Le Si... si... si... : JPRP

Ce mois-ci c'est JPRP qui répond aux questions du Si... si... si... !

 

 

1. Si je devais citer un élément déclencheur qui m'a poussé à acquérir mon premier original et donné envie de collectionner ?

 

Bonjour à tous, la BD et moi, le plaisir à l’état brut et l’émotion, c’est ainsi que je qualifierais mon rapport au Neuvième Art … Je ne suis pas un grand connaisseur, je ne suis pas un spécialiste, ni un investisseur, je suis modestement un petit collectionneur, un amateur de ce Neuvième Art, et qui affectionne cet univers !

 

Je ne veux pas vous raconter ma vie, loin s’en faut, car qui intéresserait-elle ? Je tiens juste à faire un petit retour en arrière, vous conter quelques anecdotes afin de vous faire appréhender et partager mon parcours dans la BD, très semblable ou comparable à celui d’autres collectionneurs (une génération !!!),  que je résume une fois de plus à Plaisir et Émotion, tout simplement !

 

Aussi loin que je me souvienne, nous ne vivions alors pas dans un monde numérique, j’ai toujours baigné dans les livres et été fasciné par ce qu’ils proposaient. Dans ma prime jeunesse, je feuilletais les encyclopédies type « Larousse » de mes Parents. L’apothéose s’est réalisée avec la collection « Tout l’Univers », innovante alors et remplie de belles illustrations attractives aux couleurs chatoyantes qui nous propulsaient et accompagnaient dans le monde de l’imagination, particulièrement les rubriques histoire et géographie.

 

Pour anecdote, après avoir consulté les pages de la préhistoire et de l’antiquité, j’avais été tellement fasciné, que lors de mes travaux manuels à la maternelle, mes dessins n’étaient que dinosaures, légionnaires romains, ou gaulois, et les monstres préhistoriques ont même pris trois dimensions grâce à la fée « Pâte à modeler », au grand étonnement de l ‘institutrice et des camarades de classe de mon petit village de province … Ils me le racontent encore !

 

 

 

 

 

Perlin et Pinpin par Maurice Cuvillier

 

 

 

 

Encore tout « minot », j’accompagnais ma mère chez ses amies, et pour faire tenir tranquille le petit et discuter tranquillement, on me confiait quelques magazines. C'est ainsi que j’ai découvert mes premières BD, Perlin-Pinpin, Fripounet-Fripounette, Sylvain-Sylvette, Pat’Apouf (…), bien souvent au sein de magazines adultes comme « le Pèlerin » avec le détective Pat’Apouf, l’almanach « Vermot » et le Petit Cirque de Fred, « Femmes d’aujourd’hui » et Bob Morane ou Ramiro de Vance …

 

Pour mes cinq ans arrive mon premier livre de « grand », un album BD, sur le thème de la préhistoire encore, « Timour, la Tribu de l’Homme Rouge », et c’est la fascination, je l’emmenais partout et le feuilletais à tout va, waouuuh ! 

 

Un an plus tard, amour de vacances d’enfance oblige (c’était une charmante petite parisienne) retour à la maison avec, en guise de consolation pour le petit amoureux transi et inconsolable, un abonnement au « journal de Mickey » - comme elle !-.

 

 

 

 

Couverture du Journal de Mickey (1970)

 

 

 

 

Le dimanche, à cette époque, il était inconcevable de ne pas fréquenter la messe et le catéchisme (aussi obligatoire, même plus, que l’école publique …) dans notre province profonde, et là, découverte des publications catholiques Fleurus, avec particulièrement Okapi, Record, Formule 1 (…), publications dans lesquelles ont débuté tant de Grands Auteurs.

 

Parallèlement, et je n’étonnerai personne, mon cadeau favori devenait l’Album BD, avec Tintin classiquement, mais surtout Astérix à chacune de ses parutions, et vers mes 8 ans, Alix de Jacques Martin, la BD Reine de mon enfance, l’aventure et l’histoire antique réunies, découverte avec « La Tiare d’Oribal » en introduction, puis « le Dernier Spartiate », et ainsi de suite avec tous les épisodes … Un premier choc graphique et émotionnel !

 

 

 

 

 

Alix couverture du "Sphnx d'Or" par Jacques Martin (1950)

 

 

 

 

Et la vie s’accélère. L’incontournable coiffeur, ami de mon père, s’était abonné à « Spirou »pour la clientèle … Pas de problème pour me couper les cheveux, et plutôt deux fois qu’une ! Arrivent ainsi mes premières gifles artistiques et émotionnelles avec Yoko Tsuno, son magnifique dessin doublé d’histoires mêlant aventures, technique et science-fiction, et la superbe Natacha Hôtesse de l’air, Bah, bah bah !!! Presque de l’amour pour le petit ado que j ‘étais !!!

 

Mes cousins, gérant un hôtel, étaient abonnés eux à Tintin pour leurs visiteurs, j’en héritais ensuite … et perdus parmi les magazines, mais ne le répétez pas à mes parents, quelques petits formats « Lug » ou « Artima » s’égaraient parmi les revues sages destinées aux jeunes de 7 à 77 ans (avec « Bianca Nevé », « Cosmos », « Safari », « Jezabel », « Akim », « Swing », « Météor », « Zembla », « Jungla », « Diaboliques », « Lucrèces », « Cléo » , « Contes malicieux » ET tant d’autres) ...

 

 

 

 

 

Portrait de Yoko Tsuno par Leloup

 

 

 

 

 

Il y a eu « Babar », suivi par « Pif gadget » avec un autre cousin, n’oublions pas « Pilote » … Le temps passe inexorablement, les années Lycée arrivent … Les lectures évoluent, Hara Kiri, Charlie (…) et survient la glorieuse époque de Métal Hurlant, si souvent ouvert en cachette pendant les études.

 

Quelle révolution, un véritable uppercut graphique et conceptuel, avec particulièrement la grande époque de Gal, Moebius, Druillet (…) et accompagné à la radio par des émissions cultes du type « les Enfants du Rock », et de toutes ces musiques innovantes, Van Halen, Vangelis, Deep Purple, Kate Bush, Blue Oyster Cult, Mike Oldfield, Tangerine Dream … Et comme il a déjà été dit dans cette rubrique, des émotions inséparables et associées !

D’autres publications et lectures apparaissent, enfin,  comme « À Suivre », « Vécu », « Bo-Doï », qui ont continuées à rythmer ma vie avant de disparaître … (Gros soupir !!!).

 

Professionnellement parlant, j’ai longtemps géré une société de Brocante et de dépôt-vente, et c’est ainsi que j’ai basculé dans la collection, travail oblige !!!  Ce fut ma première période collectionneur, le temps de l’accumulation ! Je préemptais tout ce qui touchait à la BD, EO comme objet … Et évidemment je me suis heurté très vite, comme la plupart des collectionneurs plus ou moins compulsifs, au problème de place. J’ai conscienseusement envahi le grenier de mes beaux-parents, et celui de ma mère n’était destiné qu’à mon usage. Une pensée émue pour ma femme qui supportait tout cela avec le meilleur esprit, et si peu de reproches !

 

Mais cela n’a qu’un temps. Arrive le jour où il faut rendre place nette, alors que nous ne disposons pas du plus petit espace libre chez soi…   Alors il faut se séparer de ce que l’on aime, évidemment souvent pas dans les meilleures conditions, et trouver des solutions : de bonnes leçons de vie ! Et l’on apprend à ses dépens à sélectionner, à être plus exigeant, à rechercher la qualité plus que la quantité. Dans ce contexte, j’ai eu l’occasion à la fin des années 80 ‘s et au début des 90’s d’obtenir auprès d’artistes et amis du monde de la BD mes premiers originaux.

 

 

 

 

Etude de personnages par Philippe Delaby (1987)

 

 

 

 

 

Et là encore quel choc, je ne pensais même pas, jusqu’à cette époque, que l’on pouvait avoir la chance de détenir des planches ou illustrations originales. Celles-ci, en dehors de leur beauté intrinsèque et leur aspect fascinant, avaient quelque chose de sacré et intouchable, un peu comme les œuvres des grands artistes que l’on découvre au musée. Là, simplement, si on ne les découvrait pas encore au musée, elles apparaissaient dans les albums et les magazines, dans ces livres si sacrés pour moi ! Presque des mythes pour faire simple. Avec cette formidable découverte, le plaisir et l’émotion étaient une fois de plus mes seuls guides et mes seules règles.

 

La vie connaît des méandres, change parfois de direction. Notre fils est arrivé triomphalement dans notre vie, avec tous les changements que cela suppose. Plus de plaisir de collectionneur, un peu égoïste, il faut bien l’avouer !

 

La priorité devient l’enfant, notre petite merveille, avec encore plus de plaisir et d’émotion -différents- chaque jour. Il faut profiter de ces merveilleuses périodes. Et là encore, il faut aussi de la place… Alors j’ai mis ma collection entre parenthèse, tout a été soigneusement emballé et remisé à la cave, place oblige. TIC TAC, TIC TAC, le temps passe , et si vite.

 

Un jour, ma très chère épouse est tombée gravement malade. Ces terribles maladies, au-delà des souffrances physiques et psychologiques isolent terriblement. Tout occupé au combat pour la vie, nous ne connaissions plus de vie sociale, la vie professionnelle elle-même devenait compliquée. Tout était fait pour préserver l’enfant, et garder un semblant de vie familiale. Nous avions alors « la tête dans le guidon » pourrais-je dire, nous étions submergés, noyés… Mais néanmoins tenus par le combat. Et quand celui-ci cesse, faute de combattant, tout s’arrête, la vie elle-même s’écroule …  

 

Alors il faut se reprendre et aller de l’avant. Personnellement, j’avais une telle sensation de vide et de manque à surmonter, que ce qui était resté latent et patent en moi depuis la mise de côté de ma collection,  a ressurgi.

 

Et ainsi, j’ai replongé ! Le plaisir et l’émotion drainés par ces originaux de BD m’ont alors permis de porter la tête hors de l’eau, de m’en sortir peu à peu. J’ai à nouveau pu doucement aller de l’avant. L’univers de la BD, ma collection plus particulièrement, m’a permis de sortir de l’ornière par ce qu’elle m’apportait. Elle me forçait à positiver, et à nouveau pouvoir jouir de la vie.

 

Ma modeste collection n’est certainement pas la plus belle, les pièces qui la composent ne sont pas les plus importantes du marché… La seule chose qui me parle, et me motive, est que la magie a repris, et m’aide de jour en jour, plaisir et émotion ! Le plaisir de collectionner ce que l’on aime, le plaisir et l’émotion qui va de pair, juste le plaisir et l’émotion produites par les œuvres que l’on apprécie, que l’on aime, chacun selon son histoire, sa sensibilité et son parcours . 

En conclusion, et vraiment très humblement, merci à tous ces beaux Auteurs, ces Artistes, qui si généreusement, nous donnent tellement … Plaisir et émotion !

 

 

2. Si je pouvais ajouter à ma collection une œuvre présentée  actuellement dans les galeries de 

2DG ?

 

Ce serait la superbe « Jeanne » réalisée par Jean-Pierre Gibrat, pour l’affiche Cajarc 2003, qui trône dans la collection de Touret … Bravo à lui !

 

 

 

 

 

 

 

3. Si je ne devais conserver qu'une seule œuvre dans ma collection ?

 

Sans aucune hésitation, ce serait ma « Natacha au bouquet » de François Walthéry !

 

 

 

 

 

 

 

4. Si je pouvais acheter une œuvre que j'ai laissé filer par le passé ?

 

Lors d’une vente aux enchères, j’ai laissé échapper une planche préparatoire du grand Jacques Martin, il s’agissait de l’esquisse de la première planche de Alix, « La Tiare d’Oribal », le livre par lequel j’ai découvert Alix …

 

 

 

 

 

 

Il y en eu d’autres, mais laissez moi juste vous conter cette anecdote pour sourire : au milieu des années 90, je rentre par hasard dans une galerie, et tombe presque nez à nez avec le magnifique auteur Philippe Delaby, qui venait de confier presque l’intégralité des planches de l’album Murena, « La Meilleure des Mères » à son ami commerçant, à des prix plus que corrects…

J’en ai acquis une, Philippe Delaby me consentit même un prix très gentiment, puis, c’était trop beau,  j’ai hésité, hésité, … J’hésite encore !!!

Je sors de chez le galeriste en question, marche quelques centaines de mètres, pénètre chez un marchand … Qui venait de rentrer une vingtaine de planches de « l’Etoile Polaire » à des prix ridiculement bas … Et j’ai hésité, hésité, … Et j’hésite encore !!! On ne se refait pas !

 

 

5. Si je pouvais avec un budget de 5 000 € acquérir une ou plusieurs œuvres parmi celles proposées en vente sur 2DG ?

 

Ce pourrait être la planche N°8 du tome 9 de « L’Épervier » réalisée par Patrice Pellerin et mise en vente par Aka.

 

 

 

 

 

 

 

Et si on pouvait poser un joker, et faire abstraction du prix, ce serait la planche de Alix, « Le Tombeau Étrusque » mise en vente par André Taymans, un auteur que j’affectionne également

 

 

 

 

 

 

 

 

ou alors la planche de Valérian, « la Cité des eaux Mouvantes » réalisée par Jean-Claude Mézières et qui était mise en vente par Duppie !

 

 

 

 

 

 

6. Si j’étais un personnage de Bande Dessinée ?

 

Ce serait Alix, il m’a tellement fait rêver ! Et n’étant plus si jeune maintenant, il faudrait que ce soit Alix Senator !!!

 

 

 

 

Alix Senator par Thierry Demarez d'après le personnage de Jacques Martin

 

 

 

7. Si j'avais la possibilité de passer une journée avec un artiste disparu ?

 

Je pense à l’immense Albert Uderzo …

 

 

 

Albert Uderzo et René Goscinny

 

 

8. Si je pouvais poser une question à cet auteur ?

 

Joker, je ne poserais pas de question, je préfèrerais assister, même tout petit dans un coin, à une séance de travail avec son comparse et ami René Goscinny …

 

9. Si je ne devais posséder qu'un seul album dédicacé dans ma collection ?

 

Je pense tout de suite à la merveilleuse dédicace de Jean-Claude Gal, « le Garde » dans la collection de VINBLOOD… Avec l’histoire qui la caractérise bien sûr !

 

 

 

 

 

 

 

10. Si je pouvais lire la suite d’une BD ?

J’aimerais connaître des suites, ce serait malhonnête de ma part d’affirmer le contraire. Mais je me dis également que si cette suite n’existe pas, c’est qu’il y a des raisons qui l’expliquent, bonnes ou mauvaises, mais néanmoins qui font partie de l’histoire, alors je respecte, et préfère m’abstenir. D’autant plus que notre part d’imagination peut jouer son rôle …

 

 

Voici enfin la réponse de à une question imaginée par Lechat lors du précédent Si... si... si... :

 

 

"Avez-vous déjà acheté une planche originale d’un auteur que vous connaissez peu et dont vous n’avez jamais lu une BD ? Et si oui, vous êtes-vous senti oblige de lire l’album dont est issue la planche ?"

 

Comme je le disais , je fonctionne avant tout à l’émotion et au plaisir, donc évidemment oui, j’ai eu l’occasion d ‘acquérir des œuvres d’auteurs que je ne connaissais pas … Il y a tellement de talent dans cet univers d’Art ...

En exemple, je peux citer le bel Auteur Andréi Arinouchkine. Je ne le connaissais pour ainsi dire pas avant de fréquenter le site de 2DG. Et bien entendu, j’ai été immédiatement touché par son immense talent, sa délicatesse et sa grande maitrise, et ai essayé de suite de me procurer quelque chose de lui. Dédicace, illustration, et enfin planches de quelques-uns de ses albums, et surtout de « La Face Cachée de Waterloo » …

 

Et bien-sûr, il fallait que je lise ses albums, un véritable régal d’ailleurs. Je n’étais en rien obligé, il fallait simplement que je le fasse, c’était presque devenu un besoin physique, l’émotion, même si cela peut se produire, ne disparaissait pas au fil des pages. Sur ces entrefaits, j’ai eu l’occasion de faire la connaissance de cet artiste, il m’a invité à venir le visiter dans son atelier, et là, j’étais sur un petit nuage…

 

 

 

"La Fille et le Bateau aux voiles écarlates" par A. Arinouchkine

 

 

 

Andréi est un Artiste magnifique, doublé d’une très belle personne. De purs petits trésors dans tous les coins de l’atelier, du beau partout, et toute la petite famille baignant dans ce monde, et étant tous plus créatifs les uns que les autres, Madame étant Autrice, et la petite fille déjà bluffante par ses réalisations …

Alors Andréi, bravo, merci et longue vie à ta carrière !

 

 

Nous remercions JPRP pour sa participation.

Rendez-vous le mois prochain !