C'est dans l'épisode
La Mort jaune que pour la première fois
Arthur PIROTON ose animer un personnage féminin séduisant, et assez entreprenant pour... embrasser sur la bouche
Jess Long, sans même lui demander son avis. Le héros gardera la tête froide face aux avances de la jeune femme, certes sexy en diable, mais bien trop jeune pour qu'il puisse se laisser embarquer dans une quelconque aventure, avec ou sans lendemain.
Si dès leur apparition dans les années 1950
Jerry Spring et
Lucky Luke sont destinés à rester deux cow-boys "solitaires" éternellement tenus à l'écart des tentations de la chair,
Jess Long, créé après la fracture de 1968, reste tout aussi stoïque et chaste, fidèle à l'esprit boy-scout et obsessionnellement asexualisé qui anime les pages de
Spirou. Le temps d'un épisode, publié du n° 2213 au n° 2223 de l'hebdomadaire fer-de-lance des
Editions DUPUIS, le débardeur palpitant et rayé de la jeune et jolie Joyce Russel - fougueuse blonde romantique et déterminée - fera tout de même rêver et phantasmer les adolescents lecteurs du beau
Journal de SPIROU.
L'agent du FBI n'y croit pas lui-même quand il prétend que le plus important c'est qu'il y a "
plein de ranchs, là-bas", au Texas. Son regard en coin est assez suggestif pour que le lecteur saisisse qu'il se joue en filigrane "autre chose" derrière cette histoire de chevaux tenus en bride et de grands espaces sauvages et plus ou moins vierges qu'il faut bien un jour franchir : le galop équestre est une métaphore du désir sexuel et de la liberté naturelle qu'on ne peut réfréner. Rien ne bouge ici, hormis de longues mèches au vent : le corps est en éveil et en mouvement, qu'on le veuille ou non, et il appelle un autre corps, suivant les lois immuables de la Nature. La composition de l'illustration, avec ses lignes de force qui mêlent en une puissante diagonale la poitrine de la jeune femme et la pipe brûlante de l'homme mûr achèvent de susciter le désir de lire le prochain épisode, dans le
Spirou de la semaine suivante. Pour le moment,
Arthur PIROTON ne dévoile pas grand chose de son héroïne fraîche, souriante et audacieuse, l'essence de l'érotisme consistant à jouer entre le voilement de l'instant présent, et les promesses d'un dévoilement à venir. Ce n'est pas grand chose, mais c'est encore trop, et l'illustration sera censurée au profit d'un montage axé sur la violence de coups de feu et la brutalité d'un accident de voiture.
Une planche de cet épisode ici :
https://www.2dgalleries.com/art/jess-long-n-7-la-mort-jaune-planche-28-1980-81537