Dans la collection de Ludovic
Capitaine Apache - Okada prend des risques
Encre de Chine
31 x 40 cm (12.2 x 15.75 in.)
Ajoutée le 28/12/2025
Lien copié dans le presse-papier !


Description
Capitaine Apache
Planche 2 de l'épisode 57 Okada prend des risques
Publication dans Pif Gadget #611 du 8 décembre 1980
Encre de Chine, crayon de papier, feutre et gouache correctrice sur papier épais
Planche 2 de l'épisode 57 Okada prend des risques
Publication dans Pif Gadget #611 du 8 décembre 1980
Encre de Chine, crayon de papier, feutre et gouache correctrice sur papier épais
Inscriptions / Signatures
NORMA
Commentaire
A propos de la série
Capitaine Apache s’inscrit dans la grande tradition du western européen tout en s'en détachant grâce à son héros. La série repose sur une idée simple, mais novatrice dans la bande dessinée jeunesse de l'époque, celle d’un héros métis, Okada, qui avance entre deux mondes et porte en lui les tensions de cultures que l’histoire a trop souvent opposées. Cette position intermédiaire donne au récit une réelle profondeur, car elle permet d’adopter un regard critique sur la conquête de l’Ouest et sur les violences qui l’accompagnent.
Le récit propose un Ouest réaliste fait de manipulations politiques, de spoliations et d'ambiguïtés. Chez Vance (Ringo), l’Ouest demeure un territoire de lumière, un espace où l’aventure conserve sa noblesse et le cavalier solitaire son héroïsme. Le récit s’inscrit dans la continuité d’un imaginaire façonné par le cinéma américain. Dans Capitaine Apache, rien n’est aussi simple. Lécureux et Norma reprennent les mêmes paysages, les mêmes codes visuels, mais ils les traitent de manière opposée.
Là où le Ringo de Vance et Acar, qui parait à la même époque dans Tintin, perpétue le rêve du western, Capitaine Apache en interroge les fondations. Dans Blueberry, Giraud et Charlier construisent un western ample, romanesque, où l’aventure se déploie avec une maîtrise quasi cinématographique. Les paysages y sont majestueux, sculptés par la lumière, et le héros avance dans un monde où la loi est malmenée, mais le récit reste porté par un certain élan héroïque. Même lorsque la série aborde les violences de la conquête, elle conserve sa dimension épique, une énergie qui, loin de le déconstruire, magnifie le mythe. Blueberry traverse l'Ouest en homme aux prises avec lui‑même, mais toujours en héros.
Face à cette épopée héroïque, Lécureux et Norma reprennent les codes du western réaliste, mais les replacent dans un cadre éditorial qui impose de prendre en compte les rapports de force, les injustices et les voix tues. Quand Blueberry incarne l’aventurier rebelle, Okada porte en lui les contradictions d’un monde fracturé. Métis apache et écossais, il avance dans un territoire où chaque rencontre rappelle la violence d’une histoire écrite par les vainqueurs.
Les peuples autochtones y sont représentés avec une empathie inhabituelle pour cette fin des années 70. Le récit ne cherche pas à édulcorer les spoliations, les manipulations politiques ou les injustices institutionnelles. Il montre au contraire comment les équilibres fragiles se brisent sous la pression des intérêts militaires et économiques. Okada devient alors une figure de médiation, un personnage qui tente de concilier l'inconciliable, et qui révèle par sa seule présence la complexité des appartenances.
Les paysages jouent un rôle essentiel. Norma les construit avec une précision documentaire, comme si les grands espaces nord-américains étaient des personnages à part entière. Les plaines, les forêts et les reliefs imposent leur rythme et leur silence. Ils façonnent l’atmosphère du récit et renforcent sa dimension tragique. On y retrouve l’influence du western italien, mais enrichie d’un souci constant de justesse géographique.
La publication dans Pif Gadget inscrit la série dans une démarche éditoriale attentive à la transmission, à la pédagogie et à une lecture critique de l'histoire. Les dossiers qui accompagnent certains épisodes prolongent cette intention et replacent les aventures d’Okada dans une perspective plus large, attentive aux réalités sociales et politiques. La bande dessinée devient ainsi un espace de vulgarisation, mais aussi de réflexion, sans jamais renoncer à la dynamique du récit d’aventure.
Au fil des épisodes, plusieurs thèmes se répondent. Le métissage et l’identité, la justice et la corruption, la mémoire et la transmission, et l’ambiguïté morale qui traverse chaque camp. Rien n’est jamais entièrement simple, et c’est cette absence de manichéisme qui donne à la série sa force durable. Si elle se situe visuellement à la croisée de Jerry Spring, Ringo et Blueberry, elle se montre plus attentive à la parole autochtone et aux fractures historiques que le western classique avait tendance à effacer.
Malgré la richesse de son univers, la série n’a jamais atteint la notoriété de ses illustres concurrentes. Le format court imposé par Pif Gadget, la qualité inégale des couleurs et peut-être aussi une certaine lassitude des auteurs ont limité son rayonnement. Pourtant, elle a marqué durablement les lecteurs qui la découvraient chaque semaine, souvent sans mesurer l’influence qu’elle exerçait sur leur perception de l’Ouest américain. Elle leur offrait une vision moins triomphante, plus humaine, où les héros ne sont pas toujours ceux que l’histoire officielle célèbre. Aujourd’hui encore, Capitaine Apache apparaît comme une tentative sincère de rééquilibrer le récit de la conquête, de lui rendre une part de nuance et d’humanité. C’est une œuvre qui, malgré les limites de son époque, anticipe des préoccupations contemporaines.
Ce texte s'appuie en partie sur l'analyse de Jean‑Yves Puyo, La représentation des grands espaces nord‑américains dans Capitaine Apache (Lécureux – Norma, 1975‑1986), Strenae n°11, 2016
Intégralité de l'étude : https://journals.openedition.org/strenae/9075
Capitaine Apache s’inscrit dans la grande tradition du western européen tout en s'en détachant grâce à son héros. La série repose sur une idée simple, mais novatrice dans la bande dessinée jeunesse de l'époque, celle d’un héros métis, Okada, qui avance entre deux mondes et porte en lui les tensions de cultures que l’histoire a trop souvent opposées. Cette position intermédiaire donne au récit une réelle profondeur, car elle permet d’adopter un regard critique sur la conquête de l’Ouest et sur les violences qui l’accompagnent.
Le récit propose un Ouest réaliste fait de manipulations politiques, de spoliations et d'ambiguïtés. Chez Vance (Ringo), l’Ouest demeure un territoire de lumière, un espace où l’aventure conserve sa noblesse et le cavalier solitaire son héroïsme. Le récit s’inscrit dans la continuité d’un imaginaire façonné par le cinéma américain. Dans Capitaine Apache, rien n’est aussi simple. Lécureux et Norma reprennent les mêmes paysages, les mêmes codes visuels, mais ils les traitent de manière opposée.
Là où le Ringo de Vance et Acar, qui parait à la même époque dans Tintin, perpétue le rêve du western, Capitaine Apache en interroge les fondations. Dans Blueberry, Giraud et Charlier construisent un western ample, romanesque, où l’aventure se déploie avec une maîtrise quasi cinématographique. Les paysages y sont majestueux, sculptés par la lumière, et le héros avance dans un monde où la loi est malmenée, mais le récit reste porté par un certain élan héroïque. Même lorsque la série aborde les violences de la conquête, elle conserve sa dimension épique, une énergie qui, loin de le déconstruire, magnifie le mythe. Blueberry traverse l'Ouest en homme aux prises avec lui‑même, mais toujours en héros.
Face à cette épopée héroïque, Lécureux et Norma reprennent les codes du western réaliste, mais les replacent dans un cadre éditorial qui impose de prendre en compte les rapports de force, les injustices et les voix tues. Quand Blueberry incarne l’aventurier rebelle, Okada porte en lui les contradictions d’un monde fracturé. Métis apache et écossais, il avance dans un territoire où chaque rencontre rappelle la violence d’une histoire écrite par les vainqueurs.
Les peuples autochtones y sont représentés avec une empathie inhabituelle pour cette fin des années 70. Le récit ne cherche pas à édulcorer les spoliations, les manipulations politiques ou les injustices institutionnelles. Il montre au contraire comment les équilibres fragiles se brisent sous la pression des intérêts militaires et économiques. Okada devient alors une figure de médiation, un personnage qui tente de concilier l'inconciliable, et qui révèle par sa seule présence la complexité des appartenances.
Les paysages jouent un rôle essentiel. Norma les construit avec une précision documentaire, comme si les grands espaces nord-américains étaient des personnages à part entière. Les plaines, les forêts et les reliefs imposent leur rythme et leur silence. Ils façonnent l’atmosphère du récit et renforcent sa dimension tragique. On y retrouve l’influence du western italien, mais enrichie d’un souci constant de justesse géographique.
La publication dans Pif Gadget inscrit la série dans une démarche éditoriale attentive à la transmission, à la pédagogie et à une lecture critique de l'histoire. Les dossiers qui accompagnent certains épisodes prolongent cette intention et replacent les aventures d’Okada dans une perspective plus large, attentive aux réalités sociales et politiques. La bande dessinée devient ainsi un espace de vulgarisation, mais aussi de réflexion, sans jamais renoncer à la dynamique du récit d’aventure.
Au fil des épisodes, plusieurs thèmes se répondent. Le métissage et l’identité, la justice et la corruption, la mémoire et la transmission, et l’ambiguïté morale qui traverse chaque camp. Rien n’est jamais entièrement simple, et c’est cette absence de manichéisme qui donne à la série sa force durable. Si elle se situe visuellement à la croisée de Jerry Spring, Ringo et Blueberry, elle se montre plus attentive à la parole autochtone et aux fractures historiques que le western classique avait tendance à effacer.
Malgré la richesse de son univers, la série n’a jamais atteint la notoriété de ses illustres concurrentes. Le format court imposé par Pif Gadget, la qualité inégale des couleurs et peut-être aussi une certaine lassitude des auteurs ont limité son rayonnement. Pourtant, elle a marqué durablement les lecteurs qui la découvraient chaque semaine, souvent sans mesurer l’influence qu’elle exerçait sur leur perception de l’Ouest américain. Elle leur offrait une vision moins triomphante, plus humaine, où les héros ne sont pas toujours ceux que l’histoire officielle célèbre. Aujourd’hui encore, Capitaine Apache apparaît comme une tentative sincère de rééquilibrer le récit de la conquête, de lui rendre une part de nuance et d’humanité. C’est une œuvre qui, malgré les limites de son époque, anticipe des préoccupations contemporaines.
Ce texte s'appuie en partie sur l'analyse de Jean‑Yves Puyo, La représentation des grands espaces nord‑américains dans Capitaine Apache (Lécureux – Norma, 1975‑1986), Strenae n°11, 2016
Intégralité de l'étude : https://journals.openedition.org/strenae/9075
1 commentaire
Pour laisser un commentaire sur cette œuvre, veuillez vous connecter
A propos de Norma
Norbert Morandière débute en 1971 dans le fanzine Falatoff où il utilise durant un an le pseudonyme Marcus, avant de choisir Norma.
Norma est principalement connu pour avoir longtemps dessiné Capitaine Apache, une série pour la jeunesse écrite par Roger Lécureux et paraissant dans Pif Gadget.
À partir des années 1990, il s’est tourné vers la bande dessinée historique avec des séries pré-publiées dans le magazine Vécu des éditions Glénat, telles que Les Souvenirs de la pendule et Pieter Hoorn, ou encore Saïto chez Soleil Productions.