Dans la collection de Vertommen
Raymond Macherot, Chlorophylle - Zizanion le Terrible - Planche originale N° 16A. - Planche originale
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Chlorophylle - Zizanion le Terrible - Planche originale N° 16A.

Planche originale
1958
Encre de Chine
Mine de plomb, encre de chine, gouache blanche sur papier à dessin.
51 x 35 cm (20.08 x 13.78 in.)
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Détail.
Détail.
Détail.
Le duc Bihoreau de Bellerente.
Détail.
Détail d'un lapin si désabusé ... Les personnages secondaires décorant les histoires de Raymond Macherot méritent qu’on s’y attarder lors de nos lectures.
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Tintin N° 20 du 14 mai 1958.
Tintin N° 20 du 14 mai 1958 - Page16-17.
Tintin N° 20 du 14 mai 1958 - Page 17 (demi supérieur).

Description

Demi-Planche de tout premier choix de l'histoire "Zizanion le Terrible" de la série Chlorophylle.

Commentaire

Cette planche est parue dans le journal Tintin N°20 du 14 mai 1958 en page 17.
Zizanion de Terrible est la 5ième histoire de Chlorophylle. Paru dans le journal Tintin en 1958 du N°14 au N°48.
Mais finalement publié en album qu’en 1977 aux éditions Jacques Glénat (en noir et blanc) et Distri-BD. En 1981 chez Lombard dans sa collection verte.
Réédité en juillet 1998 dans la collection « Classique du rire » au Lombard.
Rassemblé dans l’intégrale Chlorophylle, Tome 2 en 2012, toujours au Lombard.


Cette demi-planche de tout premier choix, composée de deux strips, est assez imposante dans sa dimension.
Avec un encrage particulièrement épais, fait au pinceau, grâce à un trait au geste ample et précis immédiatement reconnaissable entre tous.
Une fois de plus, grâce au talent de Raymond Macherot, le plaisir des yeux est vraiment au rendez-vous !


Raymond Macherot naquit à Vervier (en Belgique) le 30 mars 1924.
S’il ressentit très tôt l’attrait du dessin, il ne peut jamais se plier à l’académisme des écoles et des ateliers. Il resta que 24 heures en stage aux Beaux-Arts.

Après avoir enchaînée plusieurs petits boulots à l’usine, il a été successivement journaliste au journal local de Verviers (Courrier du Soir), marin (un an dans la Royal Navy, en février 45), fonctionnaire de l’Enregistrement, dessinateur humoristique à l’hebdomadaire Pan (magazine satirique bien connu en Belgique), il se tourna vers ce qui devait être son activité favorite : la bande dessinée.

Il rencontre Jacques Martin (habitant lui aussi à Verviers à ce moment-là en 1950) et il adressa, au journal Tintin, plusieurs page d’une histoire de chevalerie qu’il intitule Le Chevalier blanc.
Si la rédaction du journal le convoque, c’est qu’ils sont intéressés par le scénario de l’histoire qui sera confié aux Funcken. Par contre, Raymond Macherot sera, lui, engagé au studio des éditions du Lombard.
Faisant ses classes au studio sous la supervision d’Evany, le responsable du studio, Raymond Leblanc, le boss, trouve intéressant sa manière de dessiner les animaux et lui permet d’en faire une bande dessinée.
L’histoire « Mission chèvrefeuille » est publiée en 1953 dans le Tintin N° 32 et sera la genèse de Chlorophylle, série humoristique et enchanteresse qui devait être suivie de bien d’autres et qui comptera des chefs-d’œuvre.

Ces débuts, outre qu’ils satisfaisaient un penchant personnel, n’étaient destinés, dans son esprit, qu’à être de petits essais venant améliorer l’ensemble des revenus.

Vu le succès, Raymond Macherot en fit son activité principale, apprenant sous la direction amicale et éclairée de Franquin et d’Hergé, les grandes règles techniques de la bande dessinée et en particulier l’art du découpage.

Je ne vais pas m’étendre sur l’ensemble des œuvres (et tableau) de Raymont Macherot 1, mais essayer de plus m’attarder sur ce qu’on pourrait dire de son œuvre de ce qu’on a dit des fables de la Fontaine 2 : sous l’apparence d’animaux, elle peint en réalité des hommes avec des intentions satiriques, ce qui n’exclut pas, malgré l’affabulation et les conventions artistiques et spécifiques, la poésie et la fraîcheur (il y a aussi le réalisme et surtout le fantastique pour ses dernières histoires).
Il caricaturait les sociétés humaines à coups de paraboles sur le monde animal, jusqu’à indisposer les autres dessinateurs, effarés par la satire violente induite de ses métaphores.
A la différence près que son temps n’y avait pas vue la parodie comprise de celles (et du temps) de la Fontaine …

La campagne constitue le cadre de prédilection de l’auteur.
Campagne fraîche et attirante, parcourue çà et là d’insectes et d’oiseaux, parsemée de fleurs et surtout surmontée de ciel bleu (et parfois orageux).
Coin exquis de la rêverie, des errances de l’enfance libre et insouciante, décor naturel de la solitude poétique et fraîche.
Toutefois, cette nature idyllique ne se réduit pas à des prés verdoyants ni à des bois ombreux. Elle se développe aussi sous des cieux plus méridionaux et c’est alors le rivage polynésien de l’Île aux Fleurs la bien nommée et surtout, la crique inondée de soleil ou Chloro et Minimum se rôtissent en se reposant de leurs exploits à Croquefredouille 3 avec ses rochers accueillants et ses cactus bénéfiques.

Dans cette histoire (et la précédente : Les croquillards) Raymond Macherot décida d’expédier ses héros dans un monde où l’homme n’existe pas, où l’animal a pu évoluer et créer une civilisation bien à lui. Il dessinera alors les deux albums pour exploiter, à peu près, toutes les implications de cette idée et nous présente cet univers où les Messieurs portent des fixe-chaussettes (qui aura son importance pour y voir plus clair … ;-) comprendront ceux qui le voudront bien …), où l’automobile date de la Belle époque, où les trains fonctionnent à la vapeur avec mécano et machiniste ...


Jusque-là, la série « Chlorophylle » avait été pré-publiée dans le journal « Tintin » avant d’être éditée en album individuel par les « éditions du Lombard », avec l’approbation du patron, Monsieur Leblanc.
Un succès d’estime s’en était suivi, sans entraîner le grand public. Cette fois, le patron censura toute idée, toute volonté de publication de ces deux histoires qu’il détestait.
Offense inacceptable, camouflet envers le créateur, qui devait s’en souvenir quelques années plus tard quand il passa chez le concurrent direct du Lombard : les « éditions Dupuis », propriétaire du journal Spirou, le challenger du journal Tintin.

Aujourd’hui un tel ostracisme apparaît invraisemblable, d’une mesquinerie dérisoire due à un esprit étroit. Mais, à l’époque, le malaise de la profession était réel.
Comment le comprendre ? Il n’y a qu’une manière de l’expliquer : Raymond Macherot était en avance sur son temps !
Son humour corrosif, grinçant, expression d’un esprit indépendant et poétique, prenait TOUTE la société à rebrousse-poil !
On alla jusqu’à prétendre reconnaître le roi des belges Baudouin Ier, surnommé le roi à la triste mine, dans la figure pincée de Mitron XIII, souverain de Coquefredouille 3, le pays des animaux.
C’est seulement en 1980/81 que furent éditées en albums ces deux fables… Les inventions textuelles comme visuelles y sont innombrables, l’artiste s’en donne à cœur-joie.

Ce rejet devait marquer du sceau de la méfiance toute la production postérieure de l’artiste au Lombard. On en publia bien quelques-unes (Le retour de Chlorophylle, La revanche d’Anthracite- Chloro joue et gagne) mais en édition brochée, secondaire donc dans l’ensemble des collections du Lombard, et qui ne rapportèrent que peu d’argent à l’artiste.
La série fut reprise par différents scénaristes et dessinateurs qui furent incapables de maintenir le niveau atteint par Macherot.


Sur cette demi-planche, nous y retrouvons nos héros, Chloro et Minimum.
De même que ce noble ambitieux mais embourgeoisé, tout en penchant vers le gâtisme, j’ai nommé le duc Bihoreau de Bellerente 4, prétendant au trône si Mitron vient à mourir. Ce conspirateur de mélodrame n’ayant aucune valeur de lui-même, aussi bête que méchant, sans aucune envergure et en exécuteur bornés de son chef, Anthracite (absent de la planche).
Apprécions également, en première case, ce lapin si désabusé. Les personnages secondaires décorant les histoires de Raymond Macherot méritent qu’on s’y attarder lors de nos lectures.
Vous constaterez également les ombres des personnages.
Presque insignifiant pour Chloro et Minimum.
Si important pour le duc comme pour suggérer, aux lecteurs, une ombre si noire, oppressante, menaçante pour nos héros.


1 Il créa d’autres séries : Le père la houle (1956), Le Colonel Clifton (1959) et du brithishissime Colonel Clifton (1961). Moins connu : Le docteur Finet a disparu (1956),
Klaxon (1956-1958), Père la Houle (1957-1958) et Promenade en mer avec René Goscinny (1958).
Avant de quitter le Lombard pour passer chez Spirou où il proposa le chat détective Chaminou (1964) puis la souris Sybilline (1965) qui occupera longtemps son esprit.
D’autres furent des personnages éphémères : Pantoufle (1966) Mirliton (1970)
Il collabore également avec Yvan Delporte pour les scénarios de Mulligan. Mais également co-scénariste d'Isabelle de Will
Il fut considéré par Hergé comme l’égal de Walt Disney.


Je vous engage à consulter les autres œuvres de Raymond Macherot se trouvant dans ma galerie 2DG :
https://www.2dgalleries.com/galleries/raymond-macherot-6178


2 Jadis, quand on n’osait pas trop se moquer des nobles, les animaux remplaçaient efficacement les pensées de l’auteur.


3 Le terme signifiant « pauvre type » dans le langage vernaculaire du 19ème siècle.


4 Bihoreau: Nom vernaculaire français donné aux hérons appartenant, dans le ¨Paléarctique occidental, au genre Nycticorax (Ordre des Ciconiiformes, famille des Ardéidés), comme le Bihoreau gris Nycticorax nycticorax (autrefois appelé Héron bihoreau). (Duquet, 2005).


Sources :
Raymond Macherot, un grand poète belge de la bd. Jacques Tcharny (Wukali le 25/07/2017)
Phénix N° 5 4ème trimestre 1967, Revue internationale de la bande dessinée. Edouard François.

Publications

  • Zizanion le terrible
  • Lombard
  • 01/1981
  • Page intérieure
  • Chlorophylle à Coquefredouille
  • Le Lombard
  • 07/1998
  • Page intérieure
  • Intégrale 2
  • Le Lombard
  • 11/2012
  • Page intérieure

Voir aussi :   Chlorophylle

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A propos de Raymond Macherot

Raymond Macherot est un auteur de bande dessinée belge. Teintée d'une poésie très personnelle, l'œuvre de Raymond Macherot exprime, à travers les métaphores animalières, une satire acérée de la société des hommes, dans un état d'esprit « écolo » avant la lettre. Toutefois, cette poésie n'exclut pas un réalisme cruel en ce qui concerne la condition animale, gouvernée par la quête de nourriture.