Dans la collection de Chricyr
André Taymans, Caroline Baldwin - Couverture T16 - Couverture originale
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Caroline Baldwin - Couverture T16

Couverture originale
2011
Encre de Chine
29.7 x 42.0 cm (11.69 x 16.54 in.)
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L’Illustration en entier. Pas de doute possible : à l’origine, cette couverture était effectivement destinée au tome 15.
Une photo, reproduite dans de nombreux sites internet, de ce qui serait la fin de la cérémonie de « Cremation of care ». Il est indubitable qu'elle a servi de référence à André Taymans ...
… la preuve avec la case 1 de la planche 3.
La chouette du billet de 1 dollar … que l’on retrouve à la planche 13.
Il suffit de retourner l’album pour constater que le visage de Caroline, sur cette couverture, n’est pas tout à fait celui auquel on a été habitué.
C’est pour pouvoir recouvrir la mèche rebelle de Caroline (cf. le 4ème de couverture juste avant) qu’André Taymans a agrandi son visage à droite et en haut, comme on peut le voir par transparence.
La magnifique statuette en résine réalisée pour la galerie « Les dessous du dessin ».
Edition spéciale pour les quinze ans du premier tome … avec en cadeau un CD de Feel the Noïzz contenant notamment la chanson « Caroline Baldwin », ainsi que le clip avec Cendrine Ketels.
Au dos, une photo de tournage avec, de gauche à droite, Jean-Pierre Talbot, André Taymans et Cendrine Ketels (en zoomant sur son poignet, vous pourrez voir le fameux petit cœur tatoué).
Un hommage très sympathique à la chanteuse et comédienne belge dans la planche 15 de « L’Ombre de la Chouette », case 3.
Les originaux des couvertures du diptyque reproduits en vis-à-vis dans le dossier du tome 4 de l’intégrale avec, à gauche, le tatouage qui a déjà été effacé mais à droite, pas encore …
Mon premier petit montage pour tester le cadrage avec l’ancienne maquette : aucun doute, ça ne fonctionne pas.
Deuxième essai : ce coup-ci, on est bien. Et ça correspond 100% aux repères.
Une comparaison entre la couverture publiée et celle qu’imaginait probablement André Taymans … Il y a effectivement de quoi avoir une attaque !
D’un autre côté, si vous êtes l’heureux possesseur du tome 4 de l’intégrale, vous aurez droit à cette magnifique version de couverture « pleine page » : le problème a disparu tout seul !

Description

Couverture du tome 16 de Caroline Baldwin : La conjuration de Bohême

S’il y a bien une couverture de Caroline Baldwin sur laquelle on peut dire une foultitude de choses, c’est celle-ci !
Alors, comme je ne rentre pas souvent de nouvelle pièce, j’ai pu prendre le temps qu’il fallait afin de vous proposer le commentaire le plus complet possible sur cette sublime illustration. J'espère juste que vous ne le trouverez pas trop long … En tout cas, j’ai tenté de structurer mon propos au mieux pour ne pas vous décourager de lire jusqu’au bout.

A noter : certaines des informations présentées ici ont été glanées dans le dossier du tome 4 de l’intégrale dont je ne saurais trop vous recommander la lecture (dossier rédigé par Anne Matheys).

Inscriptions / Signatures

Monogramme AT dans l'illustration (à gauche) + signature au crayon en bas à droite

Commentaire

1- C’est quoi cette statue ?
Alors déjà, il faut savoir que cette couverture a été initialement dessinée pour le premier tome du diptyque : "L’ombre de la chouette" comme le prouve de façon très claire le titre visible sur le scan complet (image additionnelle n°1).
Donc, en sachant cela, il est déjà plus facile de reconnaître le volatile figuré par cette statue-totem qui occupe le second plan. Ce titre, "L’ombre de la chouette", était d’ailleurs beaucoup plus adapté à ce visuel (et vice-versa).

Quant à savoir pourquoi cette couverture a finalement servi pour le second tome …
L’hypothèse la plus probable serait que l’histoire était initialement prévue sur seul album et a été étirée en deux parties à la demande de l’éditeur. En effet, la parution du diptyque a coïncidé avec l’arrivé d’un nouveau responsable éditorial chez Casterman. Or, celui-ci n’était pas du tout en phase avec la série et André Taymans a dû se plier à un certain nombre d’exigences. Tout ceci est détaillé dans le dossier de l’intégrale dont je me permets de citer un extrait ci-dessous :
« Exit le côté contemplatif qui était un élément majeur dans le succès de la série et que lui reproche aujourd’hui Reynold Leclerc. Celui-ci veut imprimer sa marque. Cela passe également par un changement de format des albums et de la maquette. »

Et donc, la scène de la statue aurait glissé dans la deuxième partie : dès lors, plus possible d’utiliser cette illustration pour la couverture de la première.

Au final, il y a néanmoins une conséquence un peu gênante à ce revirement : en effet, quand on lit le premier tome, il est strictement impossible de comprendre la signification du titre (puisqu’il n’y a pas de chouette …) ! Mais sans doute était-il trop tard pour le modifier car il avait probablement déjà été communiqué dans le planning des futures parutions …

2- C’est quoi cette chouette ?
Cette statue (qui serait soit en ciment, soit taillée dans la pierre, selon les sources) mesure 12 mètres de haut. Elle symboliserait Moloch, une divinité cananéenne du troisième millénaire avant Jésus Christ dont le culte était associé à des sacrifices d’enfants par le feu.
Elle se trouve à Monte Rio en Californie dans une propriété baptisée "Bohemian Grove". C’est là que se réunissent tous les ans, pendant la seconde quinzaine de juillet, les membres d’un club masculin très conservateur : « Le Bohemian Club » dont le symbole est une chouette. C’est un club ultra élitiste, très fermé : il y a une liste d’attente d’une vingtaine d’années pour pouvoir espérer y entrer.
Le nom du club est inspiré de la bohème (façon de vivre dans l’insouciance et la pauvreté qui fut revendiquée par ses premiers membres, en 1872) ce qui est plutôt ironique quand on sait qu’aujourd’hui la cotisation annuelle s’élève à 25 000 dollars !

La cérémonie du Cremation of care (Bûcher des soucis), par laquelle débutent les deux semaines, serait basée sur d’anciens rites druidiques et sumériens. Elle se déroule au pied de la statue. Durant la cérémonie, des haut-parleurs diffusent un discours préenregistré pour donner l’illusion que c’est la chouette géante qui parle. A la fin, une effigie d’enfant est brûlée sur un bûcher afin de symboliser la disparition des soucis pour les membres du club.

Pour bien comprendre l’importance de la symbolique de la chouette, il faut également savoir qu’elle fait partie des innombrables images dissimulées dans le billet d’un dollar : on peut la trouver en haut à droite du fameux billet vert : voir à la planche 13 de l’album.

3- C’est quoi ce visage ?
Lorsque j’ai découvert cette couverture, à la sortie de l’album, j’ai été très surpris par le visage de Caroline qui m’a semblé différent. Il est un peu plus large, il a perdu sa forme caractéristique en olive.
Or, en observant l’original, on peut voir que le visage est une rustine. C’est quasiment invisible, même de près, mais il y a bien eu une retouche.
J’ai donc amené l’œuvre aux laboratoires du Louvre pour qu’ils la passent aux rayons X (Non, je déconne : j’ai pris une photo par transparence devant une lampe et je l’ai ensuite retournée !). On voit bien sur l’image n° 6 que le visage initial était plus proche de ce à quoi on est habitué (et que l’on retrouve d’ailleurs dans l’album).

Alors, pourquoi cette transformation ?
Et bien en fait, c’était pour être raccord avec la statuette en résine qui est sortie à la même époque (image n°7) et qui devait être la première d’une série. André Taymans a donc, à la demande de la sculptrice, adapté le visage de Caroline et supprimé tout ce qui était impossible à réaliser en 3D ou ne donnait pas bien (comme sa fameuse mèche rebelle). [Merci à André Taymans himself pour cette info exclusive !]
Et c’est probablement aussi pour la même raison que Caroline porte sa fameuse robe noire sur la couverture. En effet, cette robe est devenue une sorte de marque de fabrique de Caroline Baldwin depuis son apparition remarquée dans le tome 4 "La dernière danse" mais pourtant, à l’exception d’une courte scène au début du tome 8 "La lagune", elle n’a jamais été réutilisée dans les albums et elle n’est donc absolument pas présente dans ce diptyque. André Taymans la réserve plutôt pour des illustrations autour du personnage ou des produits dérivés. Il n’y avait donc aucune raison de retrouver Caroline en robe noire sur cette couverture à part, encore une fois, pour faire le lien avec la sculpture.

Et dire que, finalement, la série s’est arrêtée dès la première statuette… Tout ça pour ça !

4- C’est quoi ce tatouage ?
En regardant les deux couvertures du diptyque, on peut voir distinctement un tatouage en forme de petit cœur sur le poignet droit de Caroline. On va le retrouver également le temps de quelques planches vers la fin du tome 15.

Alors, pourquoi ce petit cœur ?
Eh bien, il se trouve que la réalisation du tome 15 a coïncidé avec le tournage du clip de la chanson Caroline Baldwin, créée par le groupe Feel the Noïzz, que vous pouvez voir ici : https://www.youtube.com/watch?v=f8WeRJZxfeE.
L’héroïne y est interprétée par Cendrine Ketels qui a été pressentie un temps pour reprendre le rôle de Caroline dans une adaptation sur grand écran.
Donc en prévision du futur film, André Taymans a pensé que ce serait une bonne idée de donner à Caroline ce tatouage qu’arbore réellement Cendrine Ketels dans la vraie vie.
L’idée n’a finalement pas trop plu à Casterman car ils n’étaient pas favorables à ce que le personnage de papier se confonde avec un personnage réel. Il a donc été demandé à André Taymans d’effacer le tatouage pour les futures rééditions de l’album. [Encore une info exclusive © André Taymans]
Et il se trouve qu’ils ont eu raison car, lorsque le projet du film a été lancé, c’est une autre actrice qui a été choisie : Carole Weyers. De plus, en plein tournage à Bangkok, le projet a capoté suite à des divergences artistiques avec le metteur en scène.

Et donc, sur l’original, le petit cœur a subi un coup de blanco … Mais heureusement, les rayons X ont pu également le faire réapparaitre (revoir image n°6) !

5- C’est quoi ce cadrage ?
En lisant la partie 1 et en regardant l’original de la couverture, vous vous êtes sans doute dit immédiatement : « Eh, mais c’est vrai, c’est bien une chouette ! »
Essayez maintenant de vous imaginer dans la même situation mais en regardant le visuel de l’album. Ce coup-ci, vous vous direz : « Ah bon … C’est une chouette, ce machin ? Mais pourquoi ils lui ont coupé la tête, ces idiots ?? »

Et là, je me suis dit que la couverture avait peut-être été dessinée avant le changement de maquette de la collection (rappel : cette illustration était à l’origine destinée au tome précédent qui a inauguré le nouvel habillage) et c’est pourquoi en respectant les repères placés par André Taymans, ça ne pouvait pas fonctionner.
Comme je suis toujours plutôt curieux, j’ai fait un essai de montage avec l’ancienne maquette tout en me calant sur les marques (image n°12), et le résultat n’est finalement pas si concluant que ça : la tête de la statue est encore moins visible. Bizarre …

Finalement, la seule chose qui peut expliquer le positionnement de ces repères serait qu’une nouvelle maquette était bien prévue mais que la couverture a été dessinée à un moment où elle n’était pas encore figée. Et ça m’a rappelé une image que j’avais récupérée en mars 2012 sur la page facebook de Caroline Baldwin avec le commentaire suivant : « Projet de couverture pour le tome 16 ».
C’est une version très en hauteur. J’ai été obligé d’y rajouter un bandeau latéral pour que le format final ne soit pas trop étroit. Je vous laisse voir le résultat sur l’image n°13. On peut remarquer que le lettrage de "Caroline Baldwin" est exactement le même que celui qui a été finalement retenu. Alors est-ce une version de travail réalisée avant le choix de la maquette et donc la sortie du tome 15 (en août 2011) ? Difficile à dire mais en tout cas, sous ce format, le résultat est plutôt satisfaisant.

Ce qui est certain, c’est qu’au moment de sortir le deuxième volet du diptyque, la maquette définitive avec son bandeau opaque était connue et il est évident qu’André Taymans a forcément demandé un recadrage de l’illustration car il y avait quand-même largement la place de positionner le bandeau titre au-dessus de la tête de la statue en élargissant l’image vers la droite, comme le montre l’autre montage que j’ai réalisé (image n°14) !

Bon bref, il vous suffit maintenant de lire ce nouvel extrait du dossier de l’intégrale pour comprendre pourquoi cet album de Caroline Baldwin fut le dernier à être publié chez Casterman …
« La sortie de La Conjuration de Bohème, deuxième partie du diptyque, marque le point de rupture entre l’auteur de Caroline et son éditeur depuis 15 ans. En découvrant l’album, André Taymans manque d’avoir une attaque. Son illustration de couverture a été recadrée en dernière minute sans son consentement, l’impression de l’album est désastreuse, les rouges ayant été poussés à fond. Pour compresser les coûts, la maison d’édition n’a délégué personne pour superviser l’impression. Cet événement, qui fait suite à une succession de graves désaccords avec son éditeur, est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. »

Quoi qu’il en soit, il faudra ensuite attendre cinq ans avant qu’André Taymans ne puisse récupérer les droits de Caroline Baldwin et enfin publier le tome 17, « Narco-Tango », aux éditions Paquet avec d’ailleurs une nouvelle magnifique couverture tout en sobriété et sensualité … mais aussi le retour de la fameuse robe noire (sur la couverture et dans une longue scène de l’album).

6- C’est quoi la conclusion ?
Si vous êtes arrivé jusqu’ici, c’est sans doute que vous êtes très courageux ou alors c’est peut-être parce que mes modestes commentaires vous ont intéressé.

Dans tous les cas, juste avant de clore mon propos, je tiens à dire que je trouve cette illustration absolument fascinante et je suis extrêmement heureux d’avoir pu acquérir cette couverture si spéciale qui montre une facette vraiment unique de Caroline Baldwin : un grand merci à Monsieur Taymans !


Caroline Baldwin, elle est trop chouette !!!


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Publications

  • La conjuration de Bohême
  • Casterman
  • 04/2012
  • Couverture
  • Intégrale 4
  • Paquet
  • 10/2017
  • Page 13,161

Voir aussi :   Caroline Baldwin

Thématiques


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A propos de André Taymans

André Taymans est un dessinateur et un scénariste de bande dessinée belge. Auteur capable de s'adapter à de nombreux styles, Il est surtout connu pour être l'auteur de la série semi-réaliste Caroline Baldwin.