Dans la collection de Boris 
Bilal, Bleu Sang - Illustration originale
9028 

Bilal, Bleu Sang

Illustration originale
1994
Techniques mixtes
Crayon et pastel sur calque
35.5 x 47 cm (13.98 x 18.5 in.)
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Page publiée
Quatrième de couverture
Texte en page 11
Texte 1
Texte 2
Détail Jill
Détail Bioskop/Horus
Crayonné dans Graphite in Progress

Description

Illustration reproduite en page 12 (pleine page) de l'ouvrage "Bleu Sang"

Inscriptions / Signatures

Signée et datée en bas à droite

Commentaire

Crayon et pastel sur calque pour une illustration présentée lors de l'exposition Bleu Sang à la Galerie Christian Desbois en 1994. Reproduite en page 12 (pleine page) de l'ouvrage "Bleu Sang", publié chez Christian Desbois Editions en novembre 1994.

Bleu Sang évoque en 41 dessins sur calque, 10 peintures acryliques et 77 courts textes la sensuelle et vénéneuse histoire d'amour de Jill Bioskop et Alcide Nikopol, dans l'ombre quelque peu envahissante du dieu égyptien Horus.

Cette illustration nous présente les trois personnages dans un moment d'intimité: Jill, la femme piège, donne une dernière touche à son maquillage bleuté, tandis que Nikopol se repose dans son bain, et que Horus en est réduit, tel un poussin, comme l'indique le texte, à "numéroter ses abattis", attitude indigne pour un faucon de sa lignée!

Bilal atteint là, pour moi, un sommet: il s'évade du cadre un peu sclérosant (pour lui) de l'art de la bande dessinée, pour rejoindre l'art tout court. Nombre de ces calques existent en cartes postales et en sérigraphies -de fort bonne qualité, au demeurant!- et je les avais à l'époque soigneusement collectionnées. Avoir pu acquérir l'un de ces originaux sur calque, et en particulier celui-là, qui traduit un moment d'intimité presque "familial" entre Jill et Nikopol, est pour moi une grande joie!

Petit aparté à propos du texte de cette illustration, pour les esthètes de la langue française: "Pour sortir de l'oeuf, les poussins agitent leur pauvres abattis. Horus ne fait pas mieux. Jill le voit bien dans sa glace".
Enki, d'origine serbe, amoureux de Baudelaire, nous montre ici sa maîtrise parfaite de la langue française. Qui se souvient du sens originel de l'expression "numéroter ses abattis"? A priori triviale, elle est en réalité parfaitement adaptée au contexte "Horus/Nikopol". Petit rappel:
"L'image bizarre que véhicule cette expression est en fait celle de la personne qui, se préparant à une lutte, doit compter (ou numéroter) ses bras et ses jambes, afin de pouvoir les retrouver à l'issue de la bataille une fois que ses membres auront été éparpillés sur le lieu du combat. L'expression, qui date du XIXe siècle, est souvent employée sous forme de menace : "Tu veux te battre ? Tu peux numéroter tes abattis !".
Mais le mot abattis, qui a eu plusieurs sens au fil du temps, nous vient du XIIe siècle où il signifiait 'massacre' (en liaison avec le verbe 'abattre' dont il est issu) avant, au XVIIe de prendre le sens de 'abattoir'." [merci le dictionnaire!]


Intéressante aussi, cette interview d'Enki Bilal dans laquelle il explique la genèse de "Bleu Sang" et à quel point ce travail a été fondateur dans l'évolution de son oeuvre:

Question : Christian Desbois, votre galeriste (aujourd’hui disparu), vous a-t-il poussé dans cette voie? (...) Comment vous est venue l’idée de réaliser la série de tableaux qui sera réunie dans « Bleu Sang » ? Que vous apporte la peinture que vous ne trouvez pas dans la BD ?



Réponse d'Enki Bilal : Disons qu’avec Christian, on s’est très vite entendu sur le fait que la bande dessinée nous intéressait mais que dans la vie il n’y avait pas que ça, il n’y avait pas que les petites cases. C’était un milieu où évoluaient des artistes, et lui, le côté artistique des dessinateurs l’intéressait en tant que galeriste, en tant qu’éditeur d’images (d’images très exigeantes en qualité). Donc, j’ai fait partie très vite du noyau dur, avec Tardi, notamment. (...) Dans notre rapport et dans mon parcours, il a été celui qui m’a aidé à avoir une ambition par rapport à ce graphisme qui pouvait s’exprimer ailleurs que dans les cases. Voilà comment notre parcours commun sur des images s’est fait (...) C’était à la fois expérimental et très jubilatoire. Il était un vrai partenaire, on se comprenait à demi-mot. Cela fonctionnait parfaitement.
Tout cela m’a amené à faire « Bleu Sang ». Dans cette période, précisément, durant laquelle je cherchais en même temps le thème de ma prochaine bande dessinée (et où la guerre en Yougoslavie commençait à vraiment me faire très, très, très mal) et commençais mon deuxième film qui était très dur à monter. (...) Tout à coup, tout s’est arrêté et là je me suis dit : « Qu’est ce que je vais faire ? Il me reste six mois, je ne vais pas me lancer dans une histoire maintenant. (...) Et c’est là que l’idée est venue. On en discutait avec Christian et il me dit : « Pourquoi ne ferais-tu pas une exposition ? Un travail qu'on ne ferait que pour cela. ». Et c’est ainsi que naît l’idée de la peinture, l’idée de « Bleu Sang ». Je fais cette série d'à peine douze toiles, une vingtaine de calques rehaussés et puis des textes, des aphorismes sur un thème très, très libre. De manière insidieuse, la guerre de Yougoslavie s’incruste dans ce travail qui est plutôt un travail sur un couple Jill Bioskop / Nikopol, le couple de ma trilogie précédente. Cette période que je consacre à cette peinture, à ces dessins, à cette écriture, sera fondatrice de mon style à venir. J’ai trouvé les outils du style qui allait devenir celui du « Sommeil du Monstre » ; ce nouveau style, je l’ai trouvé dans la peinture de « Bleu Sang ».




L'interview complète, réalisée pour l'exposition "Oxymore and more" peut être trouvée notamment ici: http://www.var.fr/documents/35004/72950/Communiqu%C3%A9+de+presse+_ENKIBILAL/de49749d-886d-42ef-872e-2b19e895810f

Publication

  • Bleu sang
  • Christian Desbois Éditions
  • 11/1994
  • Page 12

Voir aussi :   Nikopol

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A propos de Enki Bilal

Enes Bilal, dit Enki Bilal est un réalisateur, illustrateur, dessinateur et scénariste de bande dessinée né en 1951 à Belgrade et installé en France. Son œuvre se situe en partie dans la science-fiction et aborde notamment les thèmes du temps et de la mémoire. En 1987, il obtient le grand prix du festival d'Angoulême.