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Baudoin/Vargas -Le Marchand d'éponges (2010) - Planche originale
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Baudoin/Vargas -Le Marchand d'éponges (2010)

Planche originale
Encre de Chine
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Le Marchand D'éponges, Baudoin/Vargas, 2010

Commentaire

A propos d'une planche...

Planche 9 du "Marchand d'éponges", dessins d'Edmond Baudoin, adapté (très fidèlement) de la nouvelle "Cinq francs pièce" de Fred Vargas, qui met en scène l'atypique commissaire Adamsberg.

La série de Vargas, j'en suis très fan, plus pour le traitement des personnages que pour les intrigues. En 2000, Baudoin et Fred Vargas concoctent à quatre mains une aventure inédite d'Adamsberg, "Les Quatre fleuves". Un bel album. Dix ans plus tard, Baudoin retrouve donc l'univers de Fred Vargas pour ce "Marchand d'éponges". La planche qui nous occupe ici, je la trouve parfaite dans sa construction, chaque dessin individuellement, et la planche dans son ensemble. C'est la première apparition du commissaire dans l'histoire. Un meurtre a été commis avec pour seul témoin, un SDF au nom étrange, Toussaint Pi. La police arrive sur les lieux...

La première case, avec cette main énorme au premier plan à gauche, que l'on croirait sortie d'une vidéo prise sur le vif ("écartez vous ! pas de photographie", le genre de truc a tourner en boucle sur BFM tv), et à droite le mot police bien visible/lisible sur le dos d'un agent, avec légèrement décentré la tête du personnage pris en cisaille entre les policiers... en cisaille et derrière certes, mais c'est le seul qui ait une tête, une parole. Les autres ne sont que silhouettes, pure action.

Dans la deuxième case, reprise de la première case en arrière plan, avec là des policiers plus identifiés, mais dont les têtes se "marchent dessus" (ils sont secondaires, dans l'histoire, et primaires dans leur comportement. tout cela est assez réaliste, somme toute...) et à l'extrême bord gauche de l'image, le visage d'Adamsberg qui surgit de l'ombre.
Dans le sens de lecture, c'est lui que l'on voit en premier, mais son traitement graphique est tellement différent que l'on a du mal à trouver le raccord avec le reste de l'image Dans l'image, et pourtant hors champ. Adamsberg, quoi....
Dès le début, sa "différence" est soulignée. Mais paradoxalement, on comprend tout de suite sa position dominante : ses deux "bulles"" cadrent les policiers. Entre lui et le clochard, les policiers forment un mur... qui va très vite disparaitre.

Case suivante, gros plans sur le commissaire. Il est définitivement "le" personnage principal, et il reste inquiétant : il a le "masque de l'autorité", il donne des ordres.

Ce masque s'efface dès la case suivante (qui me fait craquer) : les policiers ont disparus (pouf ! plus besoin !), et c'est le premier face à face... non, justement, pas un face à face, Adamsberg tourne la tète. il n'est jamais frontal, Adamsberg, plutôt le genre à prendre les chemins détourné. Et dans son regard, une humanité qu'on ne soupçonnait pas jusqu'alors, l'esquisse d'un sourire. Et dans le regard du clochard, qui a enfin un visage, une curiosité, un peu amusée ("Ah ? il n'y a donc pas que des "uniformes" ?") pour cette étrange apparition...
Une case bizarrement apaisée, muette, un changement de rythme.
Tout le reste de l'histoire va être cette rencontre entre les deux hommes.

Dans cette planche, en 4 cases, Edmond Baudoin réussi à faire passer tout ça, et ce 'tout ça', c'est ce qui fait que j'aime tellement retrouver Adamsberg dans les livres de Fred Vargas. Juste 4 cases...
Edmond Baudoin...

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A propos de Edmond Baudoin

Edmond Baudoin, né à Nice, est un auteur de bande dessinée et illustrateur français. Il a reçu trois prix du festival d'Angoulême, dont celui du meilleur album en 1991 pour Couma acò. Les albums de Baudoin sont principalement en noir et blanc. Leur originalité graphique se situe entre la peinture et la bande dessinée. Le fait qu'il utilise des pinceaux pour travailler ses aplats de noir n'est sans doute pas étranger à cela. Ses thèmes de prédilection sont le portrait, la rencontre, l'autobiographie, le voyage.