Dans la collection de EricB 
2000 - Liens de sang - Hermann - Planche 37 - Planche originale
2812 

2000 - Liens de sang - Hermann - Planche 37

Planche originale
2000
Techniques mixtes
Crayon et aquarelle
32.5 x 43 cm (12.8 x 16.93 in.)
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Nighthawks
L'arrière saison
Angouleme
Angouleme
Expo DM

Description

Planche 37 du one shot Liens de sang paru en 2000 aux Editions Le Lombard, par Hermann père et fils.

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L'album “Liens de sang”, d’où est issue cette planche, avec Yves H. au scénario, est le tome 1 de la "trilogie américaine" d’Hermann ("Liens de Sang", "Manhattan Beach" et "The girl from Ipanema” respectivement en 2000, 2002 et 2005). Ces trois one-shots présentent trois variations sur le thème du polar ou du roman noir américain. Ainsi, “Liens de sang” nous plonge dans un polar fantastique où il est question d'un parricide.

Au début, tous les ingrédients sont là pour nous laisser supposer qu’il s’agit de la descente aux enfers d’un jeune policier un peu trop naïf, Sam Leighton. Fraîchement débarqué de sa province natale, il se retrouve dans les bas-fonds d'une mégapole américaine gouvernée par la criminalité et la corruption. Cette histoire est racontée à travers des aller-retours entre les années trente et cinquante. Rapidement on comprend que les auteurs nous conduisent en fait à la frontière du fantastique, rappelant en cela un peu le film "Angel Heart" (1987) d'Alan Parker avec Mickey Rourke et Robert de Niro.

La lumière et l'ombre... Dans cette planche, Hermann joue sur un contraste de couleurs entre une première partie assez doucereuse ou la couleur rose domine, et une seconde partie (les deux derniers tiers de la planche) ou l’auteur s'est inspiré de l'œuvre la plus célèbre du peintre américain Edward Hopper, plus particulièrement la case n°8. Il s'agit de "Nighthawks" ("Oiseaux de Nuit" ou "Noctambules" en français), qui est une huile sur toile de 1942, un tableau qui fait actuellement partie de la collection du musée "The art institute of Chicago". Ce tableau qui était l’œuvre préférée du peintre décédé en 1967 à New-York, a également inspiré des cinéastes tels que par exemple Ridley Scott pour "Blade runner" (1982) ou Wim Wenders pour "The end of violence" (1997). La lumière crue de l'intérieur du bar nocturne (sensé se situer à New-York, sur la 7ème avenue, dans Greenwich Village, en plein cœur du quartier où habitait Hopper) attire le regard et accentue l'obscurité de la nuit. Le contraste crée un effet dramatique qui évoque la solitude humaine dans l'agitation de la grande ville. Les cinéastes majeurs influencés par Hopper sont nombreux, il est possible de citer Alfred Hitchcock avec "Fenêtre sur cour" et David Lynch avec "Paris Texas".

D'ailleurs, de façon générale, l'œuvre d'Edward Hopper a inspiré de très nombreux artistes du XXème siècle, notamment des peintres figuratifs ou paysagers, plus curieusement elle a aussi inspiré des peintres abstraits.

Cette peinture est également le point de départ du roman "L'arrière-saison" de l'écrivain Philippe Besson, publié en 2002 (Grand Prix RTL-Lire 2003). Ce dernier, après avoir vu à plusieurs reprises ce tableau et s'en être procuré une reproduction, a observé la femme en robe rouge assise au comptoir du café "Phillies" entourée de trois hommes. L'envie de raconter l'histoire de cette femme et des trois hommes, dans un café de Cape Cod (Sud-Est de l'État du Massachusetts), s'est alors imposée à lui.

Par ailleurs, ce tableau de Hopper serait lui-même inspiré d'une nouvelle d'Hemingway ("The Killers" de 1927 dans laquelle deux tueurs attendent un boxeur dans un bar pour l’assassiner) qui a aussi donné un très beau film de Robert Siodmak ("The Killers" sorti 1946), et un court-métrage d'Andreï Tarkovski ("Les Tueurs", réalisé en 1956 et sorti en 1958).

Enfin, le sévère problème d'audition d'Edward Hopper permet de lire différemment sa peinture au delà du tableau "Nighthawks": Cette surdité, certes partielle, semble sous-tendre quasi systématiquement le choix de ses sujets, notamment celui de la représentation d'individus qui ne communiquent jamais, ne se regardent pas, ne se parlent pas.

Une analyse du tableau sous forme de podcast (émission "Secret professionnel" sur France Culture, au moment de l'exposition Edward Hopper au Grand Palais en 2012) est disponible ici: https://www.franceculture.fr/emissions/secret-professionnel/le-secret-professionnel-du-nighthawks-dedward-hopper

Hermann apprécie particulièrement cette planche dans sa production personnelle. Il s’arrête en effet sur elle dans la vidéo (Hermann par Hermann) tournée à l’occasion de la visite qu’il fait de son exposition lors du Festival d’Angoulême 2017 ou elle était présentée au milieu de dizaines d'autres, semblant en apprécier le traitement des couleurs qui fait ressortir "l'absence de relations humaines" dans cette scène, dans cette ville, dans cette histoire: https://www.youtube.com/watch?v=fGPCw2XvaSc, ou bien: https://www.youtube.com/watch?v=hdzTPhDIZrM, ou encore: https://www.youtube.com/watch?v=sKBe5Paw3L4. Cette planche fait également partie de la sélection présentée dans le reportage du magazine BODOÏ du 27 janvier 2017 à l’occasion de ce même festival: http://www.bodoi.info/angouleme-2017-lexpo-hermann/

Hermann s'est donc amusé à reprendre les personnages de "Nighthawks" dans le bistrot (le couple et le barman) qu'il représente dans sa planche. Il y a ajouté une voiture rouge sang qui accentue le caractère froid et blafard de la seconde partie de la planche et de cette grande case en particulier.

Éloignée des canons "classiques" des œuvres les plus recherchées d'Hermann (c’est-à-dire les planches noir et blanc des années 70 et 80) cette planche en couleurs directes m'avait véritablement marqué lors de la lecture de l'album, mais aussi lors du visionnage des deux vidéos mentionnées ci-dessus et enfin lors de la lecture de plusieurs ouvrages relatifs à l'œuvre d'Hermann (cf. publications jointes à ce descriptif).

Je m'étais dit que j'essaierai de saisir l'occasion (si jamais elle se présentait un jour et je ne pensais pas que cela soit le cas) d'acquérir cette planche 😎.

Publications

  • Liens de sang
  • Le Lombard
  • 09/2000
  • Page 39
  • Hermann - Le naturaliste de la bande dessinée
  • 9Eart+
  • 01/2017
  • Page 31
  • Hermann, L'encre noire du Sanglier des Ardennes
  • Plg
  • 01/2017
  • Page 182

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A propos de Hermann

Hermann, de son vrai nom Hermann Huppen, est un dessinateur et scénariste belge de bande dessinée. Il a reçu en 2016 le Grand prix de la ville d'Angoulême pour l'ensemble de sa carrière.