Artwork for sale by Sultans of Manga
The Boy from Keni Valley | Akahon manga | 4pgs29-32
Ink
11 x 16 cm (4.33 x 6.3 in.)
4 planches au format 11 x 16 cm
Price : 450 €
[$]
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Description
Ensemble des planches 29 à 32
Publication dans Shinpan Baby #29 par Enomoto Hōreikan (榎本法令館)
Encre de Chine sur papier
Publication dans Shinpan Baby #29 par Enomoto Hōreikan (榎本法令館)
Encre de Chine sur papier
Comment
Akahon : prémices populaires du manga moderne
Lorsque l’on évoque un petit livre rouge, on pense naturellement à Mao Zedong et son recueil de maximes révolutionnaires. Mais au Japon, bien avant l’essor de ce manifeste, d’autres petits livres rouges circulaient déjà, les akahon, fascicules illustrés bon marché, porteurs d’un imaginaire populaire foisonnant. Deux objets modestes, deux vecteurs d’époque : l’un pour structurer la pensée, l’autre pour la libérer.
Le terme akahon (赤本), littéralement « livre rouge », désigne à l’origine les ouvrages pour enfants à couverture écarlate diffusés durant l'époque d'Edo, particulièrement entre 1661 et 1748. Réactivé à l’ère Meiji (1868-1912), il s’applique alors aux récits illustrés et aux fascicules bon marché destinés à la jeunesse. Dès les années 1930, le mot désigne plus spécifiquement une catégorie de mangas populaires, reconnaissables à leur format souple, leur esthétique criarde et leur diffusion hors des circuits éditoriaux classiques. Ces fascicules, souvent agrafés et dotés d’une couverture cartonnée aux teintes rouge orangé, étaient imprimés sur des tracés noirs ou violets. Leur style graphique, volontairement racoleur, privilégiait l’humour burlesque, les situations absurdes et les rebondissements spectaculaires. Distribués à très bas prix dans les confiseries, les librairies de location (kashihon), les étals de rue ou lors de festivals, ils incarnaient une culture de l’instantané, de l’accessible et du bricolage narratif.
La législation sur le droit d’auteur y était largement ignorée : couvertures réutilisées sans autorisation, personnages copiés depuis des mangas à succès ou des médias étrangers, caméos non officiels de célébrités comme Rikidōzan ou Misora Hibari… L’akahon s’inscrivait dans une économie parallèle de l’image, où l’emprunt et la réinvention prenaient le pas sur l’originalité juridique. Certains titres étaient même produits par des imprimeurs ou des fabricants de jouets en guise d’activité secondaire.
Au-delà de leur apparente légèreté, les akahon jouent un rôle fondamental dans l’histoire du manga. Ils forment un chaînon entre les traditions narratives japonaises, rouleaux emaki, théâtre de rue kamishibai, et l’émergence d’un langage graphique propre au manga contemporain. Leur narration directe, leur ancrage dans la culture populaire et leur esthétique accessible préfigurent les grandes révolutions artistiques des années 1950. C’est dans ce contexte qu’Osamu Tezuka (1928–1989), tout jeune auteur dans un Japon meurtri par la guerre, publie La Nouvelle Île au trésor (Shin Takarajima) en janvier 1947. Adaptation très libre du roman de Stevenson, réalisée en collaboration avec Shichima Sakai, cette œuvre diffusée sous forme d’akahon rencontre un succès fulgurant avec plus de 400 000 exemplaires vendus, un chiffre exceptionnel pour ce type de publication. Osamu Tezuka y introduit une narration cinématographique inédite, faite de découpages dynamiques et de cadrages inspirés du cinéma américain.
Le boom des mangas akahon atteint son apogée entre 1948 et 1950. Mais dès 1955, leur prix dépassant les 100 yens et les campagnes de lutte contre les « mauvais livres » (akusho tsuihō undō) entraînent leur déclin. Parallèlement, quelques éditeurs survivent en fournissant des mangas aux librairies de location, amorçant la transition vers le kashihon manga, ancêtre du manga de bibliothèque. Ce jalon qu’est l’akahon marque l’entrée du manga dans une nouvelle ère, où narration cinématographique, imaginaire foisonnant et hybridation des médias redéfinissent les contours d’une bande dessinée japonaise destinée à une jeunesse en quête d’évasion, de rêve et de légèreté.
The Boy from Keni Valley (ケニ谷の少年) s’inscrit pleinement dans la tradition du manga d’aventure de l’après-guerre. Le jeune protagoniste, au visage rond et aux yeux pétillants, évoque les figures enfantines popularisées par Osamu Tezuka. Les animaux qui peuplent l’histoire semblent eux aussi tout droit sortis de son univers graphique, établissant un décor familier et engageant pour les jeunes lecteurs. Sur le plan narratif, l’œuvre puise davantage dans l’esprit de Boy Kenya (少年ケニヤ, 1951–1955) de Sōji Yamakawa : débrouillardise, danger latent, et quête initiatique dans un environnement sauvage. Mais ici, l’action se déroule clairement au Japon, à travers vallées et forêts, avec un héros affrontant des ennemis humains plutôt que des fauves africains.
Bien qu’aucune Vallée de Keni ne soit répertoriée au Japon, le titre ケニ谷の少年 semble jouer sur les connotations exotiques de Boy Kenya. Ce glissement toponymique suggère un hommage implicite, tout en réinscrivant l’aventure dans un paysage domestique. Témoignage précieux d’une époque où l’akahon servait de laboratoire créatif entre influences étrangères et culture populaire japonaise, cette œuvre illustre la capacité des artistes d’Osaka à hybrider les codes narratifs et visuels pour façonner des récits accessibles et captivants, destinés à une jeunesse avide d’évasion.
Lorsque l’on évoque un petit livre rouge, on pense naturellement à Mao Zedong et son recueil de maximes révolutionnaires. Mais au Japon, bien avant l’essor de ce manifeste, d’autres petits livres rouges circulaient déjà, les akahon, fascicules illustrés bon marché, porteurs d’un imaginaire populaire foisonnant. Deux objets modestes, deux vecteurs d’époque : l’un pour structurer la pensée, l’autre pour la libérer.
Le terme akahon (赤本), littéralement « livre rouge », désigne à l’origine les ouvrages pour enfants à couverture écarlate diffusés durant l'époque d'Edo, particulièrement entre 1661 et 1748. Réactivé à l’ère Meiji (1868-1912), il s’applique alors aux récits illustrés et aux fascicules bon marché destinés à la jeunesse. Dès les années 1930, le mot désigne plus spécifiquement une catégorie de mangas populaires, reconnaissables à leur format souple, leur esthétique criarde et leur diffusion hors des circuits éditoriaux classiques. Ces fascicules, souvent agrafés et dotés d’une couverture cartonnée aux teintes rouge orangé, étaient imprimés sur des tracés noirs ou violets. Leur style graphique, volontairement racoleur, privilégiait l’humour burlesque, les situations absurdes et les rebondissements spectaculaires. Distribués à très bas prix dans les confiseries, les librairies de location (kashihon), les étals de rue ou lors de festivals, ils incarnaient une culture de l’instantané, de l’accessible et du bricolage narratif.
La législation sur le droit d’auteur y était largement ignorée : couvertures réutilisées sans autorisation, personnages copiés depuis des mangas à succès ou des médias étrangers, caméos non officiels de célébrités comme Rikidōzan ou Misora Hibari… L’akahon s’inscrivait dans une économie parallèle de l’image, où l’emprunt et la réinvention prenaient le pas sur l’originalité juridique. Certains titres étaient même produits par des imprimeurs ou des fabricants de jouets en guise d’activité secondaire.
Au-delà de leur apparente légèreté, les akahon jouent un rôle fondamental dans l’histoire du manga. Ils forment un chaînon entre les traditions narratives japonaises, rouleaux emaki, théâtre de rue kamishibai, et l’émergence d’un langage graphique propre au manga contemporain. Leur narration directe, leur ancrage dans la culture populaire et leur esthétique accessible préfigurent les grandes révolutions artistiques des années 1950. C’est dans ce contexte qu’Osamu Tezuka (1928–1989), tout jeune auteur dans un Japon meurtri par la guerre, publie La Nouvelle Île au trésor (Shin Takarajima) en janvier 1947. Adaptation très libre du roman de Stevenson, réalisée en collaboration avec Shichima Sakai, cette œuvre diffusée sous forme d’akahon rencontre un succès fulgurant avec plus de 400 000 exemplaires vendus, un chiffre exceptionnel pour ce type de publication. Osamu Tezuka y introduit une narration cinématographique inédite, faite de découpages dynamiques et de cadrages inspirés du cinéma américain.
Le boom des mangas akahon atteint son apogée entre 1948 et 1950. Mais dès 1955, leur prix dépassant les 100 yens et les campagnes de lutte contre les « mauvais livres » (akusho tsuihō undō) entraînent leur déclin. Parallèlement, quelques éditeurs survivent en fournissant des mangas aux librairies de location, amorçant la transition vers le kashihon manga, ancêtre du manga de bibliothèque. Ce jalon qu’est l’akahon marque l’entrée du manga dans une nouvelle ère, où narration cinématographique, imaginaire foisonnant et hybridation des médias redéfinissent les contours d’une bande dessinée japonaise destinée à une jeunesse en quête d’évasion, de rêve et de légèreté.
The Boy from Keni Valley (ケニ谷の少年) s’inscrit pleinement dans la tradition du manga d’aventure de l’après-guerre. Le jeune protagoniste, au visage rond et aux yeux pétillants, évoque les figures enfantines popularisées par Osamu Tezuka. Les animaux qui peuplent l’histoire semblent eux aussi tout droit sortis de son univers graphique, établissant un décor familier et engageant pour les jeunes lecteurs. Sur le plan narratif, l’œuvre puise davantage dans l’esprit de Boy Kenya (少年ケニヤ, 1951–1955) de Sōji Yamakawa : débrouillardise, danger latent, et quête initiatique dans un environnement sauvage. Mais ici, l’action se déroule clairement au Japon, à travers vallées et forêts, avec un héros affrontant des ennemis humains plutôt que des fauves africains.
Bien qu’aucune Vallée de Keni ne soit répertoriée au Japon, le titre ケニ谷の少年 semble jouer sur les connotations exotiques de Boy Kenya. Ce glissement toponymique suggère un hommage implicite, tout en réinscrivant l’aventure dans un paysage domestique. Témoignage précieux d’une époque où l’akahon servait de laboratoire créatif entre influences étrangères et culture populaire japonaise, cette œuvre illustre la capacité des artistes d’Osaka à hybrider les codes narratifs et visuels pour façonner des récits accessibles et captivants, destinés à une jeunesse avide d’évasion.
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