Les aventures de Chick Bill en Arizona - Tome 1 - Chick Bill contre L'invisible - planche 15.

Les aventures de Chick Bill en Arizona - Tome 1 - Chick Bill contre L'invisible - planche 15 pour une lecture en format à l’italienne.

Signé (dernière case de la deuxième planche).

Les aventures de Chick Bill en Arizona - Tome 1 - Chick Bill contre L'invisible - planche 15 pour une lecture en format à l’italienne.


Les aventures de Chick Bill en Arizona ont été prépublié dans le magazine « Chez nous/Juniors » à partir du 30 octobre 1953.
Ensuite :
- Assemblé en album, aux Editions du Lombard, en janvier 1954.
- Republié aux Editions R.T.P / Dessinateurs de notre temps - Archives n° 3 de 1974.
Avec un dossier de 10 pages par André Leborgne, consacré à Tibet en début d'album
- Chick Bill contre "invisible", toujours aux Lombard et dans la colledtion 'BéDingue' en 1983.
- Les meilleures histoires du journal tintin, éditions Rombaldi en 1984
‎etc …


La planche présentée fait partie d’un ensemble de deux planches et prépublié dans le magazine « Chez nous/Juniors », N° 8 du 17 décembre 1953, en page 8 et 9.
(Voir l’autre planche du diptyque : www.2dgalleries.com/art/les-aventures-de-chick-bill-en-arizona-tome-1-chick-bill-contre-l-invisible-planche-16-146806)
En effet, ces deux planches se lisent côte à côte, à l'italienne.
Raison pour laquelle il n’y a qu’une signature en la dernière case de la deuxième planche.
Planche restaurée (voir visuel sur les très nombreuses traces de papier collant au niveau des phylactères).
La gouache blanche masquant le texte original, en néerlandais, se trouvant dans les phylactères.

Nous y retrouvons l’ensemble des protagonistes de cette toute première histoire de Chick Bill.
Même l’invisible s’y trouve ;-)

Pour permettre un maximum de visuel, le diptyque est présenté en deux présentations différentes.


Un sujet du support de la publication de ce premier opus, d’une série qui deviendra célèbre, commençons dans les arcanes linguistiques de la Belgique car il est intéressant de noter que l’édition de deux hebdomadaires d’expression française est patronnée par des quotidiens d’expression flamande.
Il s’agit de Chez Nous, correspondant à Ons Volk édité par De Standaard (Ons Volk et Chez Nous sont édités par deux sociétés anonymes distinctes) et de Samedi correspondant à Ons Zondagsblad édité par Het Volk. Il est à retenir que ces deux hebdomadaires catholiques déclarent une diffusion particulièrement importante dans le Hainaut (la moitié du tirage de Chez Nous, le tiers du tirage de Samedi) (1).

Donc, à l'image du Petit Vingtième, en 1932 dans l'hebdomadaire familial Ons Volk, un supplément pour la jeunesse intitulé Ons Volkske, naîtra.
Ons Volkske a publié principalement des artistes de bandes dessinées belges et néerlandais, les plus notables étant Marc Sleen ( Piet Fluwijn en Bolleke ), Willy Vandersteen ( De Vrolijke Bengels ), Bob de Moor , Piet van Elk, Henk Albers, Albert van Beek, Gommaar Timmermans, Hurey , Gilbert Declercq , Gert Ronde, Karel Verschuere, Jacques Van Melkebeke , Jo-El Azara et Tibet.

Mais comment Tibet (2) a atterrit dans cette publication ?
Grâce à Raymond Leblanc, qui a investi dans cette publication (voir plus bas).
Cet hebdomadaire était une sorte de clone du journal Tintin édité avec la collaboration du Lombard.
En raison de son prix bas et de son papier d'impression moins cher, "Ons Volkske" a gagné le surnom de "version pour homme pauvre de Tintin ", mais malgré cela, il était toujours le magazine de bande dessinée de tendance en Flandre et s'est très bien vendu, sur abonnement uniquement, à son apogée.
Y était également publiée la production du Studio Vandersteen.


Parlons maintenant de Tibet durant la période qui a vu naître la série « Chick Bill » ou il lui a fallu de peu pour qu’il ne soit pas dans l’écurie « Tintin ». Donc nous ne parlerons pas de sa période « Mickey Magazine » et « Heroïc-Albums ».
Ecoutons-le lors d’un entretient (3)
« … Fin 1950, j’avais, par relations, obtenu un rendez-vous avec Monsieur Dupuis, car je voulais absolument travailler pour « Spirou ».
J’y admirais déjà Franquin sans encore le connaître personnellement. J’avais rendez-vous un mercredi. Comme nous étions un lundi et que j’habitais Bruxelles, je me suis décidé à aller frapper à la porte du Lombard. J’ai tout de suite été engagé … »

Devenu maquettiste-illustrateur au journal «Tintin», il est directement mit dans le bain. Il a tout d’abord illustré « le vase de Madame La Rillette » (un conte d’Yves Duval. Une couverture d’un « Spécial » Vacances ». Il animera également diverses rubriques comme « Tintin-Mondial », Pêle-Mêle », « D’un sport à l’autre » ou « Il faut de tout pour faire un monde ».
Il réalisera également certaines mises en couleurs, dessinera tous les titres à la main.
Suivra une histoire complète scénarisée par son ami Duchâteau (Yoyo s'est évadé !) et enchaîne avec divers personnages éphémères. Comme Globule, Jean et Gigi, la famille Petitoux, Mouminet, quelques gags de « Titi et son chien Tutu » qui seront publiés le plus souvent à la va vite suite au désistement, de dernière minute, d'un annonceur.

Raymond Leblanc lui commande une série mettant en scène des personnages animaliers.
Le but est simple et direct, il faut concurrencer "Mickey-Magazine"(4), alors en pleine expansion.
Tibet esquisse Mac Aniche, puis Ricket et son cheval Toupet.
Leblanc lui suggère de modifier les noms, jugés trop infantiles. Pour le reste, tout va bien. Tibet se range volontiers à cet avis, il n'a d'ailleurs pas trop le choix, et rebaptise ses personnages Chick Bill et Confetti.

Tibet ayant débuté au Journal de Mickey, emploie initialement un style comparable à celui des bandes dessinées Disney en dessinant des personnages d'animaux anthropomorphes.
Le personnage principal Chick Bill ressemble à un jeune lion, arborant une superbe banane rousse (5). Son patronyme sonne américain, ce qu'on demande à un héros du far-west.
Mais pour les autres on comprend mieux leurs noms : Petit Caniche est un jeune chien à la touffe de poil au bout de ses oreilles pendantes, Dog Bull le shérif de Wood City est est un bon gros bull dog aux bajoues tombantes. Quand à Kid Ordinn, c'est un porc qui préfère manger et se reposer plutôt que passer à l'action.
Parmi les indiens on y trouve oiseaux, chiens, pumas … Les habitants de la ville sont des chiens, rongeurs, singes, chats ... Le méchant, Panthario, est une panthère noire, accompagnée d'un reptile (Camay Léon), d'un gorille et d'un boeuf. On remarque que certains animaux restent tels qu'ils sont réellement, comme les chevaux (dont Confetti la monture de Chick), des bovins ou caprins, même des chiens, comme Victoria la chienne du restaurateur de la ville.


Et « Bardaf, c’est l’embardée » (6). Destiné au départ au très jeune public, ce western mettant en scène des personnages à tête d'animaux, dans un style très "disneyen", ne recevra pas la validation d’Hergé, échaudé peut-être par l'insuccès de son « Popol et Virginie au Pays des Lapinos ».
Dans un autre point de vue, Tibet a sans doute eu un mauvais timing. Un an plus tard, la drôle de bande dessinée animalière de Raymond Macherot, Chlorophylle (1954), obtient le feu vert à Tintin et connaît un succès instantané.

Raymond Leblanc, en investisseur avisé, avait un contrat avec le magazine flamand de bandes dessinées « Ons Volkske » pour soumettre des bandes dessinées précédemment publiées de Tintin ainsi que du nouveau matériel.
Le 30 avril 1953, « Ons Volkske » eu une revue sœur de langue française, « Chez Nous Junior » et souvent abrégée en «Junior» (voir plus haut).

Tibet reçut un courrier d'André Fernez (7) lui annonçant cette sortie imminente de " Chez Nous-Junior ".
À charge pour lui, sans délai, de dessiner une double page hebdomadaire de son Chick Bill.
Par retour de courrier, Tibet lui répond favorablement car il avait tout son temps. Il faisait son service militaire (8) en France (9) dans l'armée de l'air, du côté de Dijon.
Donc, durant les 18 mois de service, Tibet envoyais en Belgique deux planches de « Chick Bill en Arizona » auquel son frère Pierrot indiquait les couleurs sur calque.
Un an plus tard, dans le numéro 35 de 1954, la même histoire a également été publiée en néerlandais dans Ons Volkske.


Nous connaissons tous la suite …
Tibet humanise progressivement ses personnages, leur donnant leur apparence définitive dès le quatrième tome (Kid Ordinn, le Rebelle). Tout en continuant cette série dans Chez Nous Junior/Ons Volkske, il dessine parallèlement des histoires plus brèves de Chick Bill, puis de Kid Ordinn (intitulées les Kidordinneries) dans l'hebdomadaire Tintin à partir de 1956. A partir de cette époque, il intensifie sa collaboration avec ce dernier hebdomadaire.

Exposition :
- les deux planches ont été présentées, lors de la plus grande exposition de planches originales que la Scandinavie ai jamais connue, au Danmarks Industrimuseum (Horsens) du 16 avril au 21 août 2011.


Je vous engage à consulter les autres œuvres de Tibet dans ma galerie :
https://www.2dgalleries.com/galleries/tibet-gilbert-gascard-16284


(1) La presse hebdomadaire d'information générale en Belgique. Dans Courrier hebdomadaire du CRISP 1961/7 (n° 97), pages 1 à 19.

(2) Le pseudonyme du dessinateur est un héritage de son frère qui, lorsqu'il était âgé d'un an et demi, était plus enclin à prononcer "Tibet" que Gilbert.

(3) « Tibet la fureur de rire » de Patrick Gaumer. Editeur : Le Lombard; Collection : Auteurs Lombard. Page 26.

(4) Situation cocasse car à 16 ans, il débute comme assistant dessinateur dans un studio de graphisme. Il y collabore à «Mickey Magazine».
Tibet y travaillait comme assistant auprès des dessinateurs belges de Mickey, Tenas et Rali.
J’en parle aussi car c’est là qu’il se lie d'amitié avec le jeune romancier André-Paul Duchâteau.

(5) d'autres prétendent que c'est un chien. Pourquoi pas, mais ses oreilles n'ont rien à voir avec celles d'un chien.

(6) Hommage à Manu Thoreau pour sa série de sketchs « Faux contact ».
Ou à la compagnie aérienne de Natacha ?

(7) A l'époque il fut rédacteur en chef du journal « Tintin ».

(8) En même temps que son frère Pierrot et dans le même service (d’abord infirmerie, ensuite à l’Etat-major).

(9) Pour la petite histoire, durant son absence, Ce ne furent pas moins que Raymond Macherot, Dino Attanasio et les époux Funcken qui le remplacèrent.