Le Docteur Poche, « La Raison du plus Fou », 1978.

Wasterlain : encre de chine pour la planche originale du gag de Docteur Poche, La Raison du plus Fou. Publiée en Noir et Blanc dans le Journal de Spirou n° 2091 du 11 mai 1978, puis dans le volume 2 de l'Intégrale Docteur Poche chez Dupuis en 2011.

C'est la première fois que Marc WASTERLAIN ose créer un gag en une planche autour de son personnage du Docteur Poche apparu en août 1976. Le gag tranche et détonne alors avec ce qui se faisait habituellement dans les pages du beau Journal de Spirou. Depuis sa création, en 1938, jamais on n'avait pu y lire un gag dans une veine d'humour aussi décalée et aussi « adulte », même si cela reste gentillet et souriant. Spirou n'est pas Pilote ! Dès la première case, le décor est planté. La bande dessinée est, comme le disait André FRANQUIN, comme une petite scène de théâtre sur laquelle faire évoluer des personnages. Ici, le décor s'affiche comme étant de carton-pâte, les arbres sont en deux dimensions, les pommes et les feuilles factices sont ostensiblement suspendues par un fil, et le trou de souffleur n'est pas situé hors champ (Paul DELIEGE s'en souviendra, dix ans plus tard, pour créer une nouvelle série d'animation hebdomadaire...). Le quatrième mur de Diderot est brisé, et il fallait un créateur au talent exceptionnel pour le faire dans le journal de Marcinelle. L'irrationalité comique, l'humour absurde, le non-sens belge explosent dans ce gag dont la publication eut son petit effet, y compris auprès des jeunes auteurs du journal qui, suivant leur tête de file qu'était Marc WASTERLAIN, osèrent peu-à-peu s'affranchir un peu plus des conventions. Dans la suite de son oeuvre, l'auteur jouera rarement ainsi des ressorts de la métafiction, préférant suivre ses pentes naturelles autour de procédés d'écriture plus classiques. Spirou, Gaston Lagaffe et un Schtroumpf viennent apporter leur contribution à cette planche qui marque un tournant aussi bien dans le processus créatif de Marc WASTERLAIN que dans la petite histoire du Journal de Spirou.