Isaac le pirate - T3

Planche originale 33 de Olga, troisième tome de la série Isaac le pirate,
Éditions Dargaud, 2002, Encre de Chine et gouache blanche sur papier
Reproduite dans le catalogue d’exposition Dessiner le temps,
Dans le cadre du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême 2022

Comme les aventures de Gus le cow-boy quittaient les paysages du western pour revenir vers San Francisco dans Beau Bandit, de même celles d’Isaac le pirate quittent les mers chaudes ou gelées pour revenir vers « la capitale ». Comme si les lumières de la ville et des femmes servaient d’aimant pour stabiliser le récit picaresque.

Alors tant qu’à être dans Paris, autant profiter de son côté ville lumières avec une planche qui fait la part belle au marivaudage sur fond de bougies. Parmi toutes les planches proposées par la formidable galerie Barbier, celle-ci m’aura tout particulièrement attiré. Et ce pour 3 raisons principales :
1. Les héros de Blain n’existent pas sans les femmes et Isaac ne fait pas exception, notamment auprès de sa belle Alice à qui il avait promis de revenir. Mais évidemment rien n’est simple car elles ont un caractère bien trempé et ne sauraient se contenter d’être à disposition quand Monsieur le juge bon
2. Sensible à la qualité de l’encrage, cette planche est un régal de jeux de lumière et d’ombre, rappelant les belles heures de Barry Lindon quand Kubrick faisait développer par Eastman Kodak des lentilles capables de filmer les jeux de l’amour et du hasard à la seule lueur de la bougie
3. La cinématique de la composition impressionne avec pas moins de 14 cases façon double gaufrier pour quasiment « filmer » les atermoiements amoureux de leurs retrouvailles, presque comme si l’ellipse disparaissait au profit d’un plan séquence amoureux.


Dans ce tome 3, Blain lauréat du meilleur album à Angoulême en 2002 avec Isaac le pirate, réussit une fois encore à rapprocher deux écoles de la bande dessinée jusqu'alors assez distinctes. « Celle classique qui privilégie un récit d'aventure tout public dont le scénario est dense et sait tenir en haleine le lecteur. Mais aussi une école plus "nouvelle vague" qui donne la part belle à un traitement graphique plus moderne et met en scène des personnages moins faciles à cerner, souvent ambigus et rattrapés par leurs états d'âme. »

Dans mon entretien Si si si, pour 2Dgalerie. je rappelais mon admiration pour Blain. Découverte lors de l’exposion Blain à Angoulême et reprise dans son ouvrage Dessiner le temps, cette planche en témoigne une fois encore.