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C'est un oiseaux... par Teddy Kristiansen, Steve T Seagle - Planche originale
1279 

C'est un oiseaux...

Planche originale
2004
Techniques mixtes
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Bullé
Quatrième de couverture
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Description

It's a bird... Planche 9

Commentaire

Un ouvrage hors norme...Une œuvre dans une œuvre tant dans la forme que dans le fond, je laisse place à une critique plus que bien menée dont je partage pointilleusement l'avis.

"c'est un avion, c'est un oiseau, non c'est..." la suite, tout le monde la connaît. Mais pour une fois, dans la bande dessinée C'est un oiseau..., parue en 2004 et réédité chez Urban Comics vendredi 26 février, ce n'est pas Superman qui est mis en avant, bien au contraire. En effet, le récit suit Steve, un scénariste de comics à qui on propose d'écrire les aventures du célèbre super-héros. Problème de taille: le jeune homme le déteste copieusement pour plusieurs raisons.

Cela ravive d'abord en lui un lourd secret de famille et d'une maladie génétique, mais aussi des souvenirs d'enfance à l'hôpital. De plus, Steve trouve Superman peu crédible, voire idiot, il dresse de "simples constats": le costume du surhomme est ridicule, les créateurs du titre (Jerry Siegel et Joe Shuster) ont inventé la kryptonite pour que leur héros ait enfin une faille, pourquoi cet homme invincible ne peut stopper les conflits géopolitiques? Et ainsi de suite. À dire vrai, le lecteur qui connaît peu Superman se pose souvent les mêmes questions, il faut plonger dans certaines œuvres pour comprendre la véritable force du célèbre et fascinant super-héros américain.

Steve refuse donc copieusement ce que tout scénariste censé aurait accepté sans hésiter. Devant les insistances de ses proches et supérieurs, il promet d'y réfléchir mais n'est pas du tout inspiré. Ses brouillons d'écriture proviennent parfois de sa vie personnelle (qui s'effondre petit à petit) tout comme le véritable scénariste de C'est un oiseau, l'américain Steven T. Seagle, reconnaît un récit semi-autobiographique et des similarités entre Steve et lui "jusqu'à un certain point" cite-t-il en fin d'ouvrage (l'artiste a travaillé sur d'autres comics dont Superman et a très certainement besoin d'une solitude forcée pour s'épanouir).

Le symbolisme du surhomme est constamment en réflexion; son invulnérabilité, son espoir insolent... tant de superlatifs qui ne siéent guère à Steve, se découvrant dans la foulée héritier de la maladie de Huntington, qui emporta sa grand-mère des années plus tôt. Méconnue et également appelée Chorée de Huntington, celle-ci se caractérise par plusieurs symptômes: troubles de l'équilibre, de la mémoire, anxiété, dépression, agressivité... et se révèlent mortelle sans espoir de guérison. Dans une bande dessinée fictive, personne ne meurt vraiment, mais dans la vie, on ne peut qu'affronter cette fatalité sans super-pouvoir.

Un sujet loin d'être léger donc, d'autant plus que son personnage principal n'est guère sympathique (peut-être l'unique "défaut" de l'ouvrage, même s'il est sans doute volontaire). Pourtant, le lecteur veut connaître "la suite", comme dans toutes les bonnes bandes dessinées. Ce "procédé d'écriture" est habilement mis en scène, avec tant d'autres, à travers de courtes planches interrompant plus ou moins l'histoire principale. Ces réflexions sur les techniques d'écriture, de dessin, de l'histoire de Superman, en complètent d'autres, plus nombreuses et philosophiques, sur la vie, la mort, l'amitié, la famille, la communication... et offrent une certaine mélancolie à C'est un oiseau... À travers son scénario, forcément, mais également son style visuel.

En effet, les dessins sont assurés par Teddy Kristiansen qui varie les genres avec une approche très expérimental; le récit primordial est croqué de façon assez simpliste, intimiste, avec une colorisation rappelant l'aquarelle, un côté plus ou moins épuré qui fonctionne bien et instaure immédiatement une touche "indépendante". Les segments secondaires (études sur la société, sur Superman, sur le travail de scénariste, sur les souvenirs d'enfance...) sont, eux, croqués de différentes façons à chaque fois (près d'une vingtaine!), jouant sur les couleurs, les non-dits (à l'instar de son "héros"), l'abstrait, le changement de "formes" pour les traits des protagonistes, etc. L'artiste danois n'en est pas à son coup d'essai puisqu'il a travaillé sur de nombreux autres comics, tels Sandman ou La Maison des Secrets, pour lesquels œuvrait également Steven T. Seagle. Le dessinateur a également illustré Paroles d'étoiles, recueil de témoignages d'enfants juifs déportés.

C'est donc une lecture recommandée pour tous les fans de bandes dessinées, évidemment, mais surtout pour ceux qui pensent, à tord, que c'est un art mineur ou que ce sont des livres pour enfants. Mieux: ceux qui détestent les super-héros, sans réellement les avoir lus -comme Steve, avouant à demi-mot détester un personnage fictif qu'il n'a finalement jamais pris le temps de connaître ni de lire- devraient apprécier et changer leur opinion grâce à C'est un oiseau...

Source:
Thomas Suinot
Auteur du site comicsbatman.fr

Publication

  • C'est un oiseau...
  • Panini Comics
  • 09/2010
  • Page 9

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