1983 - Manara - Le Déclic - P17

Scandale Sexuel: L'essence du Déclic
Une ambiance de « bonheur bourgeois », puis un « klik » immédiatement suivit d’un « scandale » ; bonheur bourgeois, klik et scandale, c’est toute la rythmique des premières scénettes du Déclic qui est regroupée ici, sur une même planche

Libération Sexuelle: L'essence de Manara
En plus d’être représentative de l'album, cette planche est forte d’une dimension militante qui illustre parfaitement l’état d’esprit libertaire et progressiste de Manara en ce début des années 80.
Dans cette scénette, qui est celle du quatrième « klik », Manara va pousser les curseurs très haut en combinant cette fois-ci deux scandales: l’un sexuel et l’autre sociétal. Le scandale sexuel est évident, la prude Claudia va, à nouveau, être sujette à la débauche dans un lieu public. Mais ici, à la débauche publique, Manara va ajouter un adultère spontané et assumé qui est un véritable pamphlet anti conventions sociales bourgeoises traditionnelles. Car, l’héroïne, soudainement désinhibée par son tortionnaire, ne va se tourner vers son bonhomme de mari, mais vers un inconnu, jeune et frustre visiblement beaucoup plus appétant et plus à même d’assouvir ses pulsions libérées. Ce faisant, Claudia se défait publiquement des conventions maritales et illustre, ouvertement, bien qu’à son corps défendant, la possibilité d’une libération féminine du carcan traditionnel, religieux et bourgeois que dénonce l’auteur.
Manara explicitera plus tard son état d’esprit : « …, la machine utilisée par le Dr Fez n’est pas l’équivalent d’un aphrodisiaque ou d’un élixir d’amour. Elle ne force personne à faire des choses qu’il ne voudrait pas faire. Au contraire, c’est un instrument libérateur. Qui annihile les freins inhibiteurs imposés par la société, la religion, le patriarcat. »
Cette planche est ainsi un échantillon parfaitement représentatif, à la fois de cet album culte, mais aussi des motivations de son auteur qui utilise son talent graphique pour ouvrir des brèches dans la bien-pensance, se faire le chantre de la libération sexuelle et illustrer l'expression du plaisir féminin sous toutes ses coutures.

Hommage
Moebius résumera bien les deux principales facettes de Manara, à la fois révolutionnaire militant et obnubilé par le sexe (ex)faible (cf image additionnelle). Il y a 40 ans, avec outrecuidance, humour et talent Manara s’est invité à la table des grands de la BD et, au-delà, des figures qui ont marqué son temps.

Il y a 40 ans, j'en avais 15, et Manara publiait le Déclic. Une claque. Moi qui me voyais artiste, devant cet Everest graphique, ce trait d'une précision laser, cette capacité à dessiner l'humain, à retranscrire, avec justesse, attitudes et émotions comme peu d'auteurs, et cet acharnement obsessionnel à illustrer l'intime au féminin, j'ai définitivement arrêté d'essayer de dessiner. Mais j'ai continué à rêver... et certainement en un peu plus grand