Le Chat du Rabbin - T6

Le Chat du Rabbin, T6 "Tu n'auras pas d'autre Dieu que moi", planche 4

Le Chat du Rabbin arrive enfin avec sa première planche partagée sur 2DG ;-)
A l'instar de Larcenet ou Blain, le Niçois Johan Sfar aura apporté une touche très dans l'air du temps par la joyeuse sensibilité de son écriture, la richesse "brouillonne" de son trait, la plongée dans culture nord africaine et séfarade, le regar sur les religions...

Et ce drôle d'animal qu'est le chat du rabbin ne laisse pas de me fasciner non par son don de la parole qui le fait rejoindre les archétypes anthropomorphés des fabliers mais par son écartèlement permanent entre une propension à prendre du recul en philosophant et son nombrilisme inimitable. Quelque part, il fait le pont entre l'enfant et l'adulte qui nous constituent.

C'est un rare privilège que d'accéder à ses originaux et j'ai eu la chance de pouvoir choisir ma planche préférée du tome 6 présenté dans son intégralité chez Barbier-Mathon. En effet, cette 1ère planche en intérieur/extérieur cristallise ce que j'aime chez Sfar: la beauté méditerranéenne de Zlabya présente sur toute les cases avec le chat, la poésie d'instants magiques ("Elle: le délicieux secret" de la grossesse), la vue sur la mer et la casbah, la lucidité égoïste du chat plus vécu comme confident qu'amoureux ("moi ça ne compte pas, un chat c'est pas comme une personne, quand elle me fait une confidence c'est comme si elle écrivait sur un journal intime"), le déchirement de la beauté inaccessible (comme les mains graciles de sa maîtresse dont l'ombre se transforme en griffes sur les souffrances du chat à la dernière case).

Ce premier quart de l'album sur la grossesse est nettement mon préféré - tant dans le dessin que dans l'écriture - avant que ne démarrent les séquences moins marquantes du questionnement en synagogue ou du vaudeville amoureux . Sfar ne s'y est pas trompé avec la couverture qui montre Zlabya de dos, pour ne pas dévoiler l'arrondi de son ventre et l'autre dieu qui sera adoré. Et les Inrockuptibles auront choisi - à raison à mon sens - la case de cette planche avec Zlabya rêvant face à la mer pour illustrer leur article (positif) sur cet album fortement autobiographique.