Dans la collection de SupHermann
Description
東京~パリ – Tokyo - Paris
Episode Un adieu et des larmes… (Namida yo sayōnara… 涙よさようなら…)
Première publication dans le magazine Shōjo des éditions Kōbunsha
Episode Un adieu et des larmes… (Namida yo sayōnara… 涙よさようなら…)
Première publication dans le magazine Shōjo des éditions Kōbunsha
Commentaire
L’intégralité du commentaire provient de la magnifique planche de Ludovic https://www.2dgalleries.com/art/tokyo-paris-196867 qu’il en soit remercié et me pardonne le plagiat !
A propos de l’influence majeure de Macoto Takahashi sur le Shōjo manga
Bien qu’il soit surtout connu pour ses illustrations de filles au style décoratif hérité de l’esthétique du jojōga d’avant-guerre, Macoto Takahashi, influencé par les peintures lyriques de Junichi Nakahara, Kayoi Takahata ou Yumeji Takehisa, tient une place de premier ordre dans l’histoire du manga. Spécialisé dans les illustrations de couvertures de magazines pour jeunes filles comme Les Fleurs (Hana - 花) au début des années 50, il fera un court mais décisif passage dans le Shōjo manga de 1953 à 1963. Il reviendra ensuite à l’illustration au travers d’une multitude d’articles de papeterie. Si Takahashi ne s’est consacré au manga qu’une dizaine d’années, il n’en est pas moins considéré comme le père du Shōjo manga moderne.
Je visais un nouveau style de manga Shōjo, et indépendamment de la disposition des panneaux du manga, j'ai composé les pages en regard et les ai dessinées comme je le souhaitais à la manière Shōjo…
Comme beaucoup, il débute sa carrière de mangaka sur le marché du manga de location avec Princesse esclave (Dorei no ōjo - 奴隷の王女) chez Enomoto (榎本法令館よ) en 1953. Sa première œuvre marquante, Paris-Tokyo (パリ~東京), publiée en 1956, est une sorte de prélude à sa remarquable série Tokyo-Paris qui parait à partir de 1958. Au cours de l’année 1957, il produit plusieurs histoires courtes pour le magazine Shōjo des éditions Kōbunsha : Mer de chagrin (Kanashimi no Hamabe - 悲しみの海べ), Le cygne de Tokyo (Tōkyō no hakuchō - 東京の白鳥), Maudite Coppéllia (Norowareta Copelia - のろわれたコッペリア) en décembre 1957, sans oublier l’incontournable Les allées de cerisiers (Sakura namiki - さくら並木). Ces histoires courtes sont les prémices de ce qui redéfinira le Shōjo manga.
Entre 1958 et 1959, dans le même magazine Shōjo, le mangaka publie deux œuvres majeures, prolongements direct des histoires éditées en 1957. La première, Au-delà de la tempête (Arashi o koete - あらしをこえて), dont la parution débute en janvier 1958, sera immédiatement suivie de Tokyo-Paris (東京~パリ), scénarisé par Seiichi Haruna et publié de juin 1958 à décembre 1959. Au travers de ces deux séries, Takahashi affirme le style graphique du sutairu-ga (スタイル画), dont l’objectif décoratif magnifie les émotions des personnages, approche graphique qu’on trouvait déjà dans les œuvres éditées en 1957. Ce style s’oppose radicalement aux techniques narratives de Tezuka, dont la référence Princesse Saphir (Ribon no kishise - リボンの騎士), publiée entre 1953 et 1956 dans le magazine Shōjo Club, se concentrait essentiellement sur l'action des personnages dans un gaufrier des plus sages.
Au-delà des images de fleurs, de rubans, de chapeaux, de jupes à ourlet flottant et de jeunes filles aux grands yeux innocents, caractéristiques du Shōjo, Yukari Fujimoto souligne dans son étude, l’importance des portraits chez Takahashi. A l’issue de recherches sur les magazines pour filles des années 1950, Fujimoto conclut ainsi que l’histoire Au-delà de la tempête, serait le premier manga à présenter une mise en page originale accompagnée d’autres éléments graphiques qui différencieront définitivement le Shōjo du shōnen. Parmi ces éléments citons le découpage libre et irrégulier de la planche, la fusion des cases en strips, les portraits, souvent en pied, qui, superposés aux cases, peuvent en traverser plusieurs, sans oublier les grands yeux bientôt étoilés des diverses héroïnes, marque de fabrique de Mocoto Takahashi.
La mangaka Miyako Maki s’inspirera du travail de Takahashi et fera partie de la toute première vague d'artistes qui adopteront son style, avec la publication de Trois filles (Shōjo san'nin - 少女三人) en août 1958. Ce renouveau impulsé par Takahashi va rapidement s'imposer dans le Shōjo au travers d’innombrables histoires dessinées et écrites par des femmes. La plus connue en France est Keiko Nagita (sous son pseudonyme Kyōko Mizuki) qui publie en 1975 dans le magazine Nakayoshi des éditions Kōdansha, l’histoire d’une petite fille aux taches de rousseur Candy Candy... Takahashi dessinera encore deux histoires entre 1960 et 1962, Princesse Anne (Purinsesu An - プリンセス・アン) et Petit La (Puchi ra -プチ・ラ), puis cessera le manga, considérant les femmes plus aptes à retranscrire les émotions d’héroïnes qu’il ne pouvait le faire lui-même.
La maison de couture japonaise Comme des Garçons a présenté une grande robe imprimée de l’une des filles emblématiques aux yeux étoilés de Takahashi pour sa collection printemps-été 2018. Plusieurs des œuvres mangas de l’artiste sont aujourd’hui conservées et présentées au Kyoto International Manga Museum.
A propos de Macoto mangaka
Si quelqu’un me définissait comme mangaka, je l’accepterais puisqu’au départ j’écrivais des mangas. Et puis j’ai commencé à vendre mes dessins car ils étaient populaires. Beaucoup de gens ont vu mes œuvres dans des magazines et différentes publications. Plusieurs groupes de merchandising sont alors venus vers moi et m’ont demandé si je pouvais dessiner des choses similaires. J’ai accepté et aujourd’hui, je dessine essentiellement des illustrations de style Shōjo. Donc, si quelqu’un me demande si je suis un mangaka, je répondrai : Je dessinais des mangas. Ce sera ma réponse car je ne suis pas pointilleux.
Macoto Takahashi, Le pionnier du style Shojo, Interview par Emmanuel Bochew, Anime News Network, 9 Sep. 2022
𝗗𝗲 𝗣𝗿𝗶𝗻𝗰𝗲𝘀𝘀𝗲𝘀 𝗮̀ 𝗥𝗲𝗯𝗲𝗹𝗹𝗲𝘀, 𝘂𝗻𝗲 𝗵𝗶𝘀𝘁𝗼𝗶𝗿𝗲 𝗱𝘂 𝘀𝗵𝗼̄𝗷𝗼
Le shōjo naît dans les années 1920, mais il faut attendre l’après-guerre pour qu’il affirme une voix propre. Les premiers récits sont l’œuvre d'auteurs masculins, notamment Osamu Tezuka, avec Princesse Saphir en 1953, ou Mitsuo Higashiura avec Mushroom-chan en 1960, qui posent les bases d’un genre encore balbutiant.
Dans la seconde moitié des années 1950, Macoto Takahashi impose une esthétique nouvelle au sein du shōjo, en rupture avec les codes narratifs dominants. Influencé par les peintures lyriques, il développe le sutairu-ga, un style graphique qui magnifie les émotions des personnages. Ce style se caractérise par des compositions éclatées aux portraits en pied qui traversent les cases, aux découpages libres, et bien sûr aux grands yeux étoilés devenus sa marque.
Des œuvres comme Au-delà de la tempête (1958) et Tokyo-Paris (1958-1959), marquent un tournant dans l’histoire du shōjo. Elles introduisent une mise en page originale, une fusion des cases en strips, et une attention nouvelle portée aux visages et aux regards. Cette approche s’oppose radicalement à celle d’Osamu Tezuka, dont Princesse Saphir privilégiait l’action dans une grille narrative plus classique.
Très vite, les femmes s’en emparent et y insufflent une manière de raconter plus introspective, plus attentive aux nuances. Pour beaucoup de jeunes lectrices, ces histoires deviennent un espace où exister, rêver et imaginer d’autres vies.
Mais le shōjo ne se résume pas aux romances et aux décors fleuris, comme on le caricature souvent. Il porte aussi des interrogations politiques, sociales et psychologiques. En 1972, Riyoko Ikeda publie La Rose de Versailles, où une jeune femme élevée en homme devient commandante de la garde royale à la veille de la Révolution française. Elle fait écho à Princesse Saphir, mais avec une modernité qui contribue au succès de la série. Le récit d’Ikeda interroge le genre, le pouvoir, le destin, à travers une figure qui échappe aux catégories. Deux ans plus tard, Moto Hagio explore l’homosexualité masculine dans Le Cœur de Thomas, situé dans un pensionnat allemand. Le shōjo s’ouvre alors à des territoires plus audacieux, plus troubles.
Cette évolution doit beaucoup au Groupe de l’an 24, un ensemble d’autrices nées autour de l’année Shōwa 24 (1949), qui révolutionnent le shōjo dans les années 1970. Moto Hagio, Keiko Takemiya, Ryoko Yamagishi, Nanae Sasaya, Yumiko Ōshima… Toutes partagent une ambition commune : faire du manga un médium adulte, capable d’aborder des thèmes complexes avec une exigence littéraire et graphique. Elles introduisent la science-fiction, le drame psychologique, les questionnements identitaires.
Leur influence dépasse largement les frontières du shōjo : elles redéfinissent ce que peut être la bande dessinée japonaise. Les années 1980 élargissent encore le champ. Yumi Tamura, avec Basara, et d’autres autrices font du shōjo un espace d’exploration où les émotions sont scrutées avec précision, où les héroïnes combattent, créent, doutent, élèvent des enfants ou vivent en marge. Aujourd’hui encore, et peut-être plus que tout autre genre, le shōjo demeure un territoire de liberté, tant graphique que narrative.
En savoir plus sur l’histoire du Shōjo manga
Yukari Fujimoto, Takahashi Macoto : The Origin of Shōjo-Manga Style, Mechamedia, vol.7, University of Minnesota Press, 2012
Deborah Shamoon, The formation of postwar Shōjo Manga, 1950–1969, in Passionate Friendship : The Aesthetics of Girl's Culture in Japan, Université d'Hawaï, 2012
Masafumi Monden, Shōjo Manga Research: The Legacy of Women Critics and Their Gender-Based Approach, University of Sydne, mars 2015
Naoko Morita, Qu’est-ce que le shōjo manga ?, neuvieme art 2.0, Cité internationale de la bande dessinée et de l'image, janvier 2021
A propos de l’influence majeure de Macoto Takahashi sur le Shōjo manga
Bien qu’il soit surtout connu pour ses illustrations de filles au style décoratif hérité de l’esthétique du jojōga d’avant-guerre, Macoto Takahashi, influencé par les peintures lyriques de Junichi Nakahara, Kayoi Takahata ou Yumeji Takehisa, tient une place de premier ordre dans l’histoire du manga. Spécialisé dans les illustrations de couvertures de magazines pour jeunes filles comme Les Fleurs (Hana - 花) au début des années 50, il fera un court mais décisif passage dans le Shōjo manga de 1953 à 1963. Il reviendra ensuite à l’illustration au travers d’une multitude d’articles de papeterie. Si Takahashi ne s’est consacré au manga qu’une dizaine d’années, il n’en est pas moins considéré comme le père du Shōjo manga moderne.
Je visais un nouveau style de manga Shōjo, et indépendamment de la disposition des panneaux du manga, j'ai composé les pages en regard et les ai dessinées comme je le souhaitais à la manière Shōjo…
Comme beaucoup, il débute sa carrière de mangaka sur le marché du manga de location avec Princesse esclave (Dorei no ōjo - 奴隷の王女) chez Enomoto (榎本法令館よ) en 1953. Sa première œuvre marquante, Paris-Tokyo (パリ~東京), publiée en 1956, est une sorte de prélude à sa remarquable série Tokyo-Paris qui parait à partir de 1958. Au cours de l’année 1957, il produit plusieurs histoires courtes pour le magazine Shōjo des éditions Kōbunsha : Mer de chagrin (Kanashimi no Hamabe - 悲しみの海べ), Le cygne de Tokyo (Tōkyō no hakuchō - 東京の白鳥), Maudite Coppéllia (Norowareta Copelia - のろわれたコッペリア) en décembre 1957, sans oublier l’incontournable Les allées de cerisiers (Sakura namiki - さくら並木). Ces histoires courtes sont les prémices de ce qui redéfinira le Shōjo manga.
Entre 1958 et 1959, dans le même magazine Shōjo, le mangaka publie deux œuvres majeures, prolongements direct des histoires éditées en 1957. La première, Au-delà de la tempête (Arashi o koete - あらしをこえて), dont la parution débute en janvier 1958, sera immédiatement suivie de Tokyo-Paris (東京~パリ), scénarisé par Seiichi Haruna et publié de juin 1958 à décembre 1959. Au travers de ces deux séries, Takahashi affirme le style graphique du sutairu-ga (スタイル画), dont l’objectif décoratif magnifie les émotions des personnages, approche graphique qu’on trouvait déjà dans les œuvres éditées en 1957. Ce style s’oppose radicalement aux techniques narratives de Tezuka, dont la référence Princesse Saphir (Ribon no kishise - リボンの騎士), publiée entre 1953 et 1956 dans le magazine Shōjo Club, se concentrait essentiellement sur l'action des personnages dans un gaufrier des plus sages.
Au-delà des images de fleurs, de rubans, de chapeaux, de jupes à ourlet flottant et de jeunes filles aux grands yeux innocents, caractéristiques du Shōjo, Yukari Fujimoto souligne dans son étude, l’importance des portraits chez Takahashi. A l’issue de recherches sur les magazines pour filles des années 1950, Fujimoto conclut ainsi que l’histoire Au-delà de la tempête, serait le premier manga à présenter une mise en page originale accompagnée d’autres éléments graphiques qui différencieront définitivement le Shōjo du shōnen. Parmi ces éléments citons le découpage libre et irrégulier de la planche, la fusion des cases en strips, les portraits, souvent en pied, qui, superposés aux cases, peuvent en traverser plusieurs, sans oublier les grands yeux bientôt étoilés des diverses héroïnes, marque de fabrique de Mocoto Takahashi.
La mangaka Miyako Maki s’inspirera du travail de Takahashi et fera partie de la toute première vague d'artistes qui adopteront son style, avec la publication de Trois filles (Shōjo san'nin - 少女三人) en août 1958. Ce renouveau impulsé par Takahashi va rapidement s'imposer dans le Shōjo au travers d’innombrables histoires dessinées et écrites par des femmes. La plus connue en France est Keiko Nagita (sous son pseudonyme Kyōko Mizuki) qui publie en 1975 dans le magazine Nakayoshi des éditions Kōdansha, l’histoire d’une petite fille aux taches de rousseur Candy Candy... Takahashi dessinera encore deux histoires entre 1960 et 1962, Princesse Anne (Purinsesu An - プリンセス・アン) et Petit La (Puchi ra -プチ・ラ), puis cessera le manga, considérant les femmes plus aptes à retranscrire les émotions d’héroïnes qu’il ne pouvait le faire lui-même.
La maison de couture japonaise Comme des Garçons a présenté une grande robe imprimée de l’une des filles emblématiques aux yeux étoilés de Takahashi pour sa collection printemps-été 2018. Plusieurs des œuvres mangas de l’artiste sont aujourd’hui conservées et présentées au Kyoto International Manga Museum.
A propos de Macoto mangaka
Si quelqu’un me définissait comme mangaka, je l’accepterais puisqu’au départ j’écrivais des mangas. Et puis j’ai commencé à vendre mes dessins car ils étaient populaires. Beaucoup de gens ont vu mes œuvres dans des magazines et différentes publications. Plusieurs groupes de merchandising sont alors venus vers moi et m’ont demandé si je pouvais dessiner des choses similaires. J’ai accepté et aujourd’hui, je dessine essentiellement des illustrations de style Shōjo. Donc, si quelqu’un me demande si je suis un mangaka, je répondrai : Je dessinais des mangas. Ce sera ma réponse car je ne suis pas pointilleux.
Macoto Takahashi, Le pionnier du style Shojo, Interview par Emmanuel Bochew, Anime News Network, 9 Sep. 2022
𝗗𝗲 𝗣𝗿𝗶𝗻𝗰𝗲𝘀𝘀𝗲𝘀 𝗮̀ 𝗥𝗲𝗯𝗲𝗹𝗹𝗲𝘀, 𝘂𝗻𝗲 𝗵𝗶𝘀𝘁𝗼𝗶𝗿𝗲 𝗱𝘂 𝘀𝗵𝗼̄𝗷𝗼
Le shōjo naît dans les années 1920, mais il faut attendre l’après-guerre pour qu’il affirme une voix propre. Les premiers récits sont l’œuvre d'auteurs masculins, notamment Osamu Tezuka, avec Princesse Saphir en 1953, ou Mitsuo Higashiura avec Mushroom-chan en 1960, qui posent les bases d’un genre encore balbutiant.
Dans la seconde moitié des années 1950, Macoto Takahashi impose une esthétique nouvelle au sein du shōjo, en rupture avec les codes narratifs dominants. Influencé par les peintures lyriques, il développe le sutairu-ga, un style graphique qui magnifie les émotions des personnages. Ce style se caractérise par des compositions éclatées aux portraits en pied qui traversent les cases, aux découpages libres, et bien sûr aux grands yeux étoilés devenus sa marque.
Des œuvres comme Au-delà de la tempête (1958) et Tokyo-Paris (1958-1959), marquent un tournant dans l’histoire du shōjo. Elles introduisent une mise en page originale, une fusion des cases en strips, et une attention nouvelle portée aux visages et aux regards. Cette approche s’oppose radicalement à celle d’Osamu Tezuka, dont Princesse Saphir privilégiait l’action dans une grille narrative plus classique.
Très vite, les femmes s’en emparent et y insufflent une manière de raconter plus introspective, plus attentive aux nuances. Pour beaucoup de jeunes lectrices, ces histoires deviennent un espace où exister, rêver et imaginer d’autres vies.
Mais le shōjo ne se résume pas aux romances et aux décors fleuris, comme on le caricature souvent. Il porte aussi des interrogations politiques, sociales et psychologiques. En 1972, Riyoko Ikeda publie La Rose de Versailles, où une jeune femme élevée en homme devient commandante de la garde royale à la veille de la Révolution française. Elle fait écho à Princesse Saphir, mais avec une modernité qui contribue au succès de la série. Le récit d’Ikeda interroge le genre, le pouvoir, le destin, à travers une figure qui échappe aux catégories. Deux ans plus tard, Moto Hagio explore l’homosexualité masculine dans Le Cœur de Thomas, situé dans un pensionnat allemand. Le shōjo s’ouvre alors à des territoires plus audacieux, plus troubles.
Cette évolution doit beaucoup au Groupe de l’an 24, un ensemble d’autrices nées autour de l’année Shōwa 24 (1949), qui révolutionnent le shōjo dans les années 1970. Moto Hagio, Keiko Takemiya, Ryoko Yamagishi, Nanae Sasaya, Yumiko Ōshima… Toutes partagent une ambition commune : faire du manga un médium adulte, capable d’aborder des thèmes complexes avec une exigence littéraire et graphique. Elles introduisent la science-fiction, le drame psychologique, les questionnements identitaires.
Leur influence dépasse largement les frontières du shōjo : elles redéfinissent ce que peut être la bande dessinée japonaise. Les années 1980 élargissent encore le champ. Yumi Tamura, avec Basara, et d’autres autrices font du shōjo un espace d’exploration où les émotions sont scrutées avec précision, où les héroïnes combattent, créent, doutent, élèvent des enfants ou vivent en marge. Aujourd’hui encore, et peut-être plus que tout autre genre, le shōjo demeure un territoire de liberté, tant graphique que narrative.
En savoir plus sur l’histoire du Shōjo manga
Yukari Fujimoto, Takahashi Macoto : The Origin of Shōjo-Manga Style, Mechamedia, vol.7, University of Minnesota Press, 2012
Deborah Shamoon, The formation of postwar Shōjo Manga, 1950–1969, in Passionate Friendship : The Aesthetics of Girl's Culture in Japan, Université d'Hawaï, 2012
Masafumi Monden, Shōjo Manga Research: The Legacy of Women Critics and Their Gender-Based Approach, University of Sydne, mars 2015
Naoko Morita, Qu’est-ce que le shōjo manga ?, neuvieme art 2.0, Cité internationale de la bande dessinée et de l'image, janvier 2021
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