Dans la collection de Spirou 
Will, Maurice Rosy, Tif et Tondu n° 14, « La Matière verte », 1968. - Illustration originale
2709 

Tif et Tondu n° 14, « La Matière verte », 1968.

Illustration originale
1968
Encre de Chine
21 x 31 cm (8.27 x 12.2 in.)
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Publication.
La couverture de l'album, 1969.
La couverture de la réédition, 1976.
La couverture de la réédition, 1983.
La couverture de la réédition, 1987.
La couverture de la réédition, Hachette, 2014.
La couverture du 6ème volume de l'intégrale, 2009.
Spirou n° 1529.
Spirou n° 1532.
Spirou n° 1543.
Affiche de l'Exposition évoquée.
Idem.

Inscriptions / Signatures

Signée, contre signée et dédicacée.

Commentaire


WILL : Illustration originale à l'encre de chine, avec rehauts de gouache blanche. Format dessin 31 par 21 cm. Signée, contre signée et dédicacée.

Annonce pour l'album 14 de TIF et TONDU,La Matière Verte, sur scénario de Maurice ROSY. Publiée en page 45 de l'album 13 Le Grand Combat aux Editions DUPUIS en 1968. Toute l'ambiance de cet épisode, et tout l'esprit de ROSY dans cette période de la fin des années 1960.


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Ci-dessous texte critique et bibliographie que j'ai eu le plaisir d'écrire pour le Catalogue de l’Exposition qui a été consacrée à WILL, du 20 juin au 20 novembre 2013, au Musée de La Maison de la Bande Dessinée, située au coeur de Bruxelles.

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L’esprit d’enfance et l’élégance de la clarté : Will, entre grâce et douceur.


Paradoxe. Celui que le grand public connaît pour ses bandes dessinées de Tif et Tondu et dans une moindre mesure d’Isabelle est un artiste qui fascinait ses pairs avant tout par le génie de ses toiles, de ses peintures, de ses aquarelles, de ses travaux d’illustrations et de décors.

TIF ET TONDU

Tif et Tondu est une série-phare du JOURNAL DE SPIROU, créée par Fernand DINEUR dès le premier numéro du 21 avril 1938. Elle est reprise en 1949 des mains d’un homme d’une autre époque se vantant d’avoir abattu jusque 14 planches en une seule journée, et faisant évoluer ses personnages au jour le jour dans des situations plus ou moins burlesques, cocasses et loufoques. Il faudra quelques années à WILL pour se dégager progressivement de l’influence pesante de DINEUR. A l’époque, de son propre aveu, WILL se cherche et tâtonne un peu, mais les qualités graphiques sont déjà là et font mouche, et les lecteurs sont loin de se douter du relatif manque de confiance du jeune repreneur de la série. Son talent et son humilité iront de pair, constamment, tout au long d’une quarantaine d’années fécondes d’autant d’albums consacrés à ces héros.
Une fois les scénarii confiés à Maurice ROSY en 1955, la série prend une tout autre dimension, pour d’emblée atteindre la stature magistrale d’un futur grand classique de l’Ecole de Marcinelle. Lorsque le duo est aux prises avec La Main blanche, le plaisir de la lecture est à son comble et pour chaque lecteur de l’hebdomadaire SPIROU, c’est le Choc ! Les albums fabuleux marqués par l’empreinte de ce personnage maléfique s’enchainent jusqu’en 1959. Elégance, chassés-croisés incessants, suspense, le tout sur fond d’ambiances et de décors aussi soignés qu’efficaces.
Cela fonctionne, ce qui permet à ROSY, après une pause de quelques années, d’oser orienter la série vers un univers lui étant plus propre et plus personnel encore. Vers une dimension onirique, poétique au sens étymologique du terme : la création, le possible de la création et de l’imagination. Oui, la matière peut être verte et prodigieusement élastique. Oui, Toar s’anime encore, huit siècles plus tard. Oui, des flèches surgissent de nulle part. Oui, le Grand Combat défie le rationnel et la logique. Oui, incompréhensiblement, Choc survit aux accidents les plus effroyables. Le lecteur est emporté, transporté, embarqué en douceur au fil d’un feuilleton hebdomadaire. Et le charme de ces planches séduit encore à la lecture des albums. On se soucie peu, contrairement aux bandes dessinées que propose au même moment André FRANQUIN, de trop raisonner et de savoir si cela pourrait réellement fonctionner, techniquement, dans la vraie vie, puisque le récit fonctionne déjà et résonne puissamment dans la vie des lecteurs.
On rêve en suivant Tondu, et on rebondit avec Tif sous l’ère ROSY, et nos auteurs dynamisent régulièrement la série, en choisissant par exemple en 1969 de substituer presque imperceptiblement à la silhouette trapue des héros des profils plus élancés graphiquement. Cette collaboration se clôt sur un diptyque à la tonalité légère et fantaisiste, où les gags visuels tiennent une place de premier plan.
Avec Maurice TILLIEUX la série prend en 1968 une tonalité plus dure, plus réaliste et plus adulte. Ce sont de véritables récits policiers que propose TILLIEUX, qui n’hésite pas à retravailler les meilleurs scénarii de Félix parus quelques vingt ans plus tôt dans HEROIC ALBUMS. Exit Monsieur Choc, place à la délicieuse Comtesse Amélie d’Yeu – Kiki pour les proches – et à la moustache so british de l’inspecteur Ficshusset. Les ambiances et les atmosphères essentielles chez ce scénariste sont parfaitement campées. Les vieux docks de Londres, les quartiers populaires de New York, la campagne anglaise, le bocage breton, les plages et les ports, un phare perdu au large des côtes, d’antiques manoirs isolés… Pour autant les protagonistes conservent des traits humoristiques et la série offre un équilibre idéal entre les ingrédients qui font qu’un album plaît aux lecteurs et résiste aux lectures multiples.
A partir de 1978, Stephen DESBERG, alors jeune scénariste, brise progressivement ce principe d’équilibre entre humour et action, en incorporant une dose d’actualité de plus en plus prégnante au fil des albums. Menaces terroristes, montée de l’extrême droite, cybercriminalité, trafics d’uranium, innovations scientifiques… La série s’inscrit dans une actualité et une contemporanéité quasi testimoniales, à travers des problématiques sociales ou politiques parfois un peu austères quoique ne manquant pas d’intérêt et de mordant. Les aventures vécues par le tandem de personnages sont parfaitement adaptées à leur époque, ce qui n’empêche pas DESBERG de s’amuser à malmener l’aura de ses héros en mettant en vis-à-vis le poids de leur très long passé et leurs capacités de réaction voire d’action physique face aux réalités des années 1980.

ISABELLE

Isabelle reste la série préférée de WILL, qu’il vit comme une récréation. Bande dessinée semi-féérique créée en 1970 sous l’impulsion du savoureux Raymond MACHEROT et de son complice Yvan DELPORTE, elle est de celles qui ont marqué toute une génération de lecteurs de l’hebdomadaire SPIROU. Trois périodes créatrices peuvent être distinguées.
La première est d’une fraîcheur champêtre et naïve, faite d’historiettes de villages et de petites villes, autour de gens modestes dont les petits tracas du quotidien sont résolus par l’intervention discrète du merveilleux. Isabelle est un personnage qui embellit leur vie, dans un climat de douceur et de gentillesse exempt de mièvrerie. C’est la période dominée par l’esprit de Raymond MACHEROT.
La seconde est plus caustique, plus vache et plus potache. Calembours et contrepèteries émaillent des récits réjouissants relevant du registre fantastique. On se souvient qu’au sortir de la guerre, alors qu’ils bénéficiaient d’un écolage hors pair chez JIJE, WILL et André FRANQUIN aimaient décompresser en fin de semaine dans les cafés de Bruxelles et Waterloo, en compagnie de MORRIS. Cette veine d’Isabelle fait écho à cette lointaine période de camaraderie et de complicité, Yvan DELPORTE prenant en quelque sorte la place laissée vacante par MORRIS. Le duo FRANQUIN / DELPORTE fait alors merveille dans l’écriture de scénarii réalisés à plusieurs mains. André FRANQUIN a une influence déterminante lors de cette passionnante période de création qui livre des albums excellents aux tonalités toutefois assez atypiques dans le paysage éditorial d’alors.
Après le départ d’André FRANQUIN, le troisième et dernier mouvement est plus sombre, plus baroque, plus inquiétant. C’est un Yvan DELPORTE vieillissant et esseulé qui exprime désormais une part de ses inquiétudes et de ses angoisses à travers une série qu’a toujours plaisir à retrouver un public initié mais malheureusement de plus en plus réduit. La superbe réussite scénaristique et graphique se clôt dans un semi-échec commercial.

L’ŒUVRE PEINT


Acrylique, gouache, aquarelle, huile ou lavis, les toiles de WILL se reconnaissent au premier coup d’œil. C’est le peintre de la sérénité, de la plénitude, d’une douce contemplation, à peine, parfois, teintée d’un soupçon de nostalgie. WILL ne peint que le beau, que la beauté, qu’il magnifie. De l’harmonie de ses compositions se dégage un amour et une compréhension profonde de la Nature et de la vie. Ses camaïeux de bleus et de verts d’un équilibre audacieux et d’une impeccable maîtrise technique semblent traduire l’aspiration au continuum d’une vie simple et tranquille.
Il a deux thèmes de prédilection : les paysages méditerranéens et les femmes les plus belles. Deux thématiques liées à la vie ardente et à la chaleur. C’est pourquoi la lumière et les couleurs vives sont au cœur d’une œuvre peint qui a pour mot d’ordre la grâce. Jamais une once de mauvais goût, jamais d’intellectualisation dans la retranscription du réel chez cet esthète instinctif. Ce qui est donné à voir est juste et beau, toujours. La perfection et la sensualité des personnages féminins est dans l’ordre naturel des choses. Cette insouciance et cette légèreté n’excluent pas la profondeur et la subtilité psychologique, notamment développées avec délicatesse dans les séries époustouflantes des Nus et des Jeunes Mariées. Avec une maîtrise et un naturel confondants, WILL parvient à donner une majesté hiératique à des sujets profanes. Et le dieu Pan – dans son essence la plus douce, de divinité primordiale et harmonieuse de la grande Nature – n’est jamais loin. A moins qu’il ne s’agisse de quelque dieu pacifique et bienveillant de la civilisation des Cyclades, à laquelle le WILL sculpteur reconnaît de profondes influences…
Longtemps la peinture de WILL est restée son jardin secret. Et si l’on peut ici jeter un pont entre l’œuvre et la vie de l’artiste, on se doit de rendre hommage au rôle et à la présence essentielle de Claude, l’épouse attentive et attentionnée, grâce à qui le dessinateur et le peintre se sont tour-à-tour exprimés avec plaisir, au fil des jours, pour notre plus grand bonheur.

WILL, L’ESPRIT D’ENFANCE ET L’ELEGANCE DE LA CLARTE


Au-delà de l’accord parfait, en chaque planche, des noirs et des blancs, WILL ne s’est jamais départi de cette force tranquille constituée par l’extrême lisibilité de ses œuvres. WILL c’est avant tout une immense clarté pour le lecteur. Un trait limpide, un rond de grâce et de douceur ? Oui, et une fluidité, un naturel verlainien, une simplicité apparente masquant volontairement le travail et l’exigence de l’auteur.
Auteur accompli, mûr, mâture et maîtrisant mille techniques. Auteur laissant toujours une place dans son œuvre au rêve simple, à l’imaginaire, au possible. Auteur s’adressant directement à la capacité d’émerveillement de son lecteur, et à l’aptitude au bonheur du public de ses toiles. Est-ce au contact initial et fondateur de JIJE que WILL doit d’avoir toute sa vie durant conservé une part de douceur, de naïveté, de bonté simple et d’enfance accomplie, toute entière présente dans ses œuvres ? Sans doute en grande partie. Et c’est là un des plus beaux cadeaux reçu de son prestigieux aîné et mentor.
Tif et Tondu, Isabelle, les peintures, les fabuleuses couleurs directes, la collection du Carrousel, les décors pour les séries des amis, les planches et les illustrations trop méconnues du magazine RECORD… Quel trait d’union profond relie toutes ces œuvres ? Il s’impose avec évidence. Le même parfum se dégage, celui de l’élégance, de la douceur, et d’une forme naturelle de tendresse, de grâce et de bonté. WILL : un homme à l’image de son œuvre.

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Repères biographiques


Artiste belge dont la renommée touche chacun des pays limitrophes au s

Publication

  • La matière verte
  • Dupuis
  • 01/1976
  • Page intérieure

Voir aussi :   Tif et Tondu

Thématiques


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A propos de Will

Willy Maltaite alias Will est un dessinateur et scénariste de bande dessinée et peintre belge, représentant de l'école de Marcinelle, en particulier connu pour les série Tif Et Tondu et Isabelle.